Plusieurs points d’achoppements persistent concernant le projet de loi de réforme territoriale. Le texte fut adopté en première lecture au Sénat le 4 février 2010, à l’Assemblée nationale le 8 juin 2010, modifié en seconde lecture au Sénat le 7 juillet 2010, à l’Assemblée nationale le 28 septembre 2010, puis présenté en commission mixte paritaire le 3 novembre, pour un énième passage devant le Sénat le 9 novembre 2010, sachant que l’Assemblée nationale aura le dernier mot. Il est donc fort probable que cela soit la version de l’UMP du 28 septembre 2010 qui prévale. De plus, si le Modem, le Nouveau Centre et l’Alliance centriste font de la résistance au Sénat, Michel Mercier soutient la position de Jean-François Copé et du gouvernement. Les forces centristes ne sont pas si unies qu’elles y paraissent.
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Le premier différend porte sur le mode de scrutin du conseiller territorial. Rappelons que la loi du 16 février 2010 prévoit la concomitance des élections cantonales et régionales en mars 2014. Si initialement, il était question d’un scrutin majoritaire uninominal à un tour couplé avec 20% de scrutin proportionnel, l’Assemblée nationale a établi le principe d’un scrutin majoritaire uninominal à deux tours. La fixation d’un seuil de 12,5% des inscrits répond au souhait d’une frange de l’UMP, laquelle a du en contrepartie accepter le maintien de triangulaire, afin de satisfaire à la requête des centristes, lesquels auraient souhaité le maintien d’un seuil à 10% des inscrits pour pouvoir se présenter au second tour. L’autre différend porte sur la limitation du cumul des mandats et la parité.
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Le second différend porte sur l’intégration contrainte des communes dans une commune nouvelle, coup de force que n’accepte pas les sénateurs. Il semblerait que les sénateurs puissent l’emporter sur ce point, l’intégration pourrait être volontaire, à suivre…
L’Assemblée nationale prévoyait que la création de la commune nouvelle puisse être réalisée - à la demande de tous les conseils municipaux ; – à la demande des 2/3 au moins des conseils municipaux des communes membres d’un même EPCI à fiscalité propre, représentant plus des 2/3 de la population totale de celles-ci ; - à la demande de l’organe délibérant d’un EPCI à fiscalité propre, en vue de la création d’une commune nouvelle en lieu et place de toutes ses communes membres, la création est subordonnée à l’accord des conseils municipaux des communes concernées au 2/3 dans un délai de 3 mois ; – à l’initiative du représentant de l’État dans le département.
Lorsque l’initiative est préfectorale, la création est alors subordonnée à l’accord des 2/3 au moins des conseils municipaux des communes intéressées, représentant plus des 2/3 de la population totale de celles-ci. À compter de la notification de l’arrêté de périmètre, chaque conseil municipal dispose d’un délai de trois mois pour se prononcer. À défaut de délibération dans ce délai, sa décision est réputée favorable. Et lorsque la demande ne fait pas l’objet de délibérations concordantes des conseils municipaux de toutes les communes concernées, mais est formée dans les conditions de majorité prévues à l’article L. 2113-2, les personnes inscrites sur les listes électorales municipales sont consultées sur l’opportunité de la création de la commune nouvelle. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de ces consultations. Les dépenses sont à la charge de l’État. La création ne peut être décidée par arrêté du représentant de l’État dans le département où se situe la commune nouvelle que si le projet recueille l’accord de la majorité absolue des suffrages exprimés correspondant à un nombre de voix au moins égal au 1/4 des électeurs inscrits dans l’ensemble des communes concernées.
Toutefois, quand le projet de création concerne des communes n’appartenant pas à un même établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, une commune ne peut être contrainte à fusionner si la consultation fait apparaître que les 2/3 des suffrages exprimés représentant au moins la 1/2 des électeurs inscrits dans cette commune ont manifesté leur opposition au projet. Tout électeur participant à la consultation, toute commune concernée ainsi que le représentant de l’État dans le département ont le droit de contester la régularité des opérations devant le tribunal administratif. Les recours ont un effet suspensif.
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Le troisième différend porte sur la clarification des compétences et les financements croisés. L’Assemblée Nationale souhaite supprimer la clause de compétence générale des départements et des régions, ce que conteste le Sénat. Intialement, le projet de loi visait à fixer des grands principes, un cadre général, permettant l’élaboration d’une future loi visant à clarifier la répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités territoriales. Cette seconde loi devait mettre fin à l’enchevêtrement des responsabilités locales, auquel répond celui des financements. Les députés ont été un peu plus audacieux et plus précis. Il est probable que le projet de loi en cours d’élaboration ressemble à celui voté par les députés :
Les compétences attribuées par la loi aux collectivités territoriales le sont à titre exclusif par défaut. Lorsque la loi a attribué à une catégorie de collectivités territoriales une compétence exclusive, les collectivités territoriales relevant d’une autre catégorie ne peuvent intervenir dans aucun des domaines relevant de cette compétence. Toutefois, la loi peut, à titre exceptionnel, prévoir qu’une compétence est partagée entre plusieurs catégories de collectivités territoriales. Les compétences en matière de tourisme, de culture et de sport sont partagées entre les communes, les départements et les régions. Une collectivité territoriale peut déléguer à une collectivité territoriale relevant d’une autre catégorie ou à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre une compétence dont elle est attributaire, qu’il s’agisse d’une compétence exclusive ou d’une compétence partagée.
Afin de faciliter la clarification des interventions publiques sur le territoire de la région et de rationaliser l’organisation des services des départements et des régions, le président du conseil régional et les présidents des conseils généraux des départements de la région peuvent élaborer conjointement, dans les six mois qui suivent l’élection des conseillers territoriaux, un projet de schéma d’organisation des compétences et de mutualisation des services. Chaque métropole constituée sur le territoire de la région est consultée de plein droit à l’occasion de son élaboration, de son suivi et de sa révision. Le schéma porte au moins sur les compétences relatives au développement économique, à la formation professionnelle, à la construction, à l’équipement et à l’entretien des collèges et des lycées, aux transports, aux infrastructures, voiries et réseaux, à l’aménagement des territoires ruraux et aux actions environnementales. Il peut également concerner toute compétence exclusive ou partagée de la région et des départements.
A compter du 1 janvier 2012, le département peut contribuer au financement des opérations dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par les communes ou leurs groupements. La région peut contribuer au financement des opérations d’envergure régionale des départements, des communes et de leurs groupements, ainsi que des groupements d’intérêt public. Toute collectivité territoriale ou tout groupement de collectivités territoriales, maître d’ouvrage d’une opération d’investissement, assure une participation minimale au financement de ce projet (20%). Par dérogation, les collectivités territoriales peuvent financer toute opération figurant dans les contrats de projet État-région et toute opération dont la maîtrise d’ouvrage relève de l’État ou de ses établissements publics.
À compter du 1er janvier 2015, aucun projet ne peut bénéficier d’un cumul de subventions d’investissement ou de fonctionnement accordées par un département et une région. Cette disposition n’est pas applicable aux subventions de fonctionnement accordées dans les domaines de la culture, du sport et du tourisme, mais le devient à défaut d’adoption dans la région concernée du schéma d’organisation des compétences et de mutualisation des services à compter du 1er janvier 2015. Par dérogation, les collectivités territoriales peuvent financer toute opération figurant dans les contrats de projet État-région et toute opération dont la maîtrise d’ouvrage relève de l’État ou de ses établissements publics.
Concernant les métropoles, elles restent des établissements publics de coopération intercommunale de plus de 500 000 habitants ou sont d’anciennes communautés urbaines instituées par la loi du 31 décembre 1966 (hors IDF). Le Préfet de département notifie pour avis le projet de création à l’assemblée délibérante de chaque département et de chaque région dont font partie les communes intéressées. À compter de cette notification, les assemblées délibérantes disposent d’un délai de 4 mois pour se prononcer. À défaut de délibération dans ce délai, celle-ci est réputée favorable. La création de la métropole peut être décidée par décret après accord des conseils municipaux des communes concernées dans les conditions de majorité.
La métropole exerce notamment de plein droit (parmi bien d’autres politiques – cf article sur les métropoles), en lieu et place des communes membres, l’organisation des transports urbains, la création, l’aménagement et l’entretien de voirie, la signalisation, les parcs de stationnement, le plan de déplacements urbains. Elle exerce de plein droit à l’intérieur de son périmètre, en lieu et place du département, les transports scolaires, la gestion des routes classées dans le domaine public routier départemental, ainsi que de leurs dépendances et accessoires. Ce transfert est constaté par arrêté du représentant de l’État dans le département.
Le transfert à la métropole des compétences obligatoires du département entraîne le transfert à celle-ci du service ou de la partie de service du département chargé de leur mise en œuvre, après avis des comités techniques compétents, selon les modalités définies ci-après. Dans un délai de six mois à compter de la création de la métropole, une ou plusieurs conventions conclues entre le président du conseil général et le président du conseil de la métropole constatent la liste des services ou parties de service qui sont, pour l’exercice de leurs missions, mis à disposition de la métropole en vue de leur transfert après consultation des comités techniques compétents. À défaut de convention passée dans le délai précité, le représentant de l’État dans le département siège de la métropole propose, dans le délai d’un mois, un projet de convention au président du conseil général et au président du conseil de la métropole. Ils disposent d’un délai d’un mois pour signer le projet de convention qui leur a été transmis. À défaut de signature du projet proposé par le représentant de l’État, la convention est établie par arrêté du ministre chargé des collectivités territoriales.
Tout accroissement net de charges résultant des transferts de compétences effectués entre la région, le département et la métropole est accompagné du transfert concomitant à la métropole des ressources nécessaires à l’exercice normal de ces compétences. Ces ressources sont équivalentes aux dépenses effectuées, à la date du transfert, par la région ou le département au titre des compétences transférées. Elles assurent la compensation intégrale des charges transférées. Les charges correspondant à l’exercice des compétences transférées font l’objet d’une évaluation préalable au transfert desdites compétences. Une commission locale pour l’évaluation des charges et des ressources transférées est composée paritairement de représentants de la métropole et de représentants de la collectivité qui transfère une partie de ses compétences à la métropole. Pour l’évaluation des charges correspondant aux compétences transférées par le département, la commission est composée de quatre représentants du conseil de la métropole et de quatre représentants du conseil général. La commission est présidée par le président de la chambre régionale des comptes territorialement compétente. La commission locale pour l’évaluation des charges et des ressources transférées est consultée sur les modalités de compensation des charges correspondant aux compétences transférées.
Les charges transférées doivent être équivalentes aux dépenses consacrées l’année précédant la création de la métropole par la région ou le département à l’exercice des compétences transférées. Ces charges peuvent être diminuées du montant des éventuelles réductions brutes de charges ou des augmentations de ressources entraînées par les transferts. Les périodes de référence et les modalités d’évaluation des dépenses engagées par la région ou le département et figurant dans les comptes administratifs avant le transfert de chaque compétence sont déterminées à la majorité des deux tiers des membres de la commission. À défaut d’accord des membres de la commission, le droit à compensation des charges d’investissement transférées est égal à la moyenne des dépenses actualisées, hors taxes, hors fonds européens et hors fonds de concours, figurant dans les comptes administratifs du département ou de la région et constatées sur une période de dix ans précédant la date du transfert, à l’exception de celles relatives à la voirie pour lesquelles la période prise en compte pour la détermination du droit à compensation est fixée à cinq ans. Les dépenses prises en compte pour la détermination du droit à compensation sont actualisées en fonction de l’indice des prix de la formation brute de capital des administrations publiques, tel que constaté à la date du transfert.
http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl09-060.html