Le Grand Pari(s) du Ministère de la Culture
En toute logique, le Président de la République n’allait pas se positionner sur les propositions du rapport Balladur concernant le Grand Paris (création d’une grande communauté urbaine et suppression des intercommunalités existantes, à l’échelle de l’ancien département de la Seine, et peut-être en voie d’élargissement à l’échelle du SMEP Paris Métropole…), sans attendre la présentation du concours d’idées organisé par le Ministère de la culture (Christine Albanel), qu’il avait lui-même commandité (2 millions d’euros).
Dix équipes pluridisciplinaires ont ainsi conceptualisé ce que pouvait être ”le grand pari de l’agglomération parisienne, métropole de l’après Kyoto”. La Ville de Paris (Pierre Mansat et Anne Hidalgo) ajoutera une rallonge budgétaire à hauteur de 400 000 euros. Participa également au débat le Conseil Régional d’Ile-de-France (Mireille Ferri en charge du SDRIF ).
La grande messe organisée à la cité de Chaillot mardi 17 mars 2009, devant un parterre averti (journalistes, architectes, élus), fut conclue par une intervention du Secrétaire d’Etat au développement de la Région Capitale, Christian Blanc (adepte des pôles de compétitivité + 4% PIB et du projet de rocade ferrée RFF, concurrencé par Roger Karoutchi et dans une moindre mesure par Valérie Pécresse). Christian Blanc annonça que Nicolas Sarkozy lancerait officiellement le projet de Grand Paris le 29 avril prochain, après avoir consulté les élus. La politesse est de mise en apparence et chacun s’attendait à ce type d’annonces, les présentations ayant été faites.
Mais de quel projet s’agit-il ? A priori, de celui de Christian Blanc. Or certains s’inquiètent déjà : Le Secrétaire d’Etat à la Région capitale prendra-t-il en compte les propositions des 10 équipes ? La sortie de Christian Blanc provoqua la réaction attendue du SMEP Paris Métropole piloté par le Maire de Paris, lequel, s’il fait consensus, se trouve toutefois confronté à la réelle difficulté du passage à l’acte sur bon nombre de dossiers (péréquation financière, transports, logements, …). Cela explique d’ailleurs le soudain rapprochement des élus UMP des Hauts-de-Seine vis-à-vis de Paris Métropole, une instance de concertation plus souple, moins coercitive, plus informelle…
La critique la guette à l’occasion d’un éventuel référendum : concrétement, qu’est-ce que le SMEP apporte aux franciliens ? Il va lui falloir inciter les “frais émoulus” élus UMP des Hauts de Seine à mettre la main à la pâte, et ce n’est pas une mince affaire, d’autant que les recettes des conseils généraux reposant en bonne partie (25% de son budget) sur les taxes sur les ventes immobilières sont en berne. Ainsi la cagnotte du CG92 a chuté de 66% entre les recettes de février 2008 et février 2009. A Paris, l’effondrement atteint 52%. La chute des droits de mutation devra être compensée par une hausse salée des impôts locaux, pas franchement populaire (hausse TH et TF), et des projets de grands chantiers pouraient bien rester en stand by en attendant la sortie de crise. Le recours à l’emprunt bancaire n’est pas toujours évident pour les collectivités, d’autant que le Médiateur désigné à cette fin par le gouvernement s’avère particulièrement discret, sans compter la présence d’emprunts toxiques restant parfois à rembourser, un pénible héritage pour le CG93.
Ceci dit, en laissant de côté les rapports de leadership territorial et la péréquation fiscale, si nous regardons les projets des 10 équipes d’aménageurs, il y a sans doute à prendre et à laisser, au risque de paraître caricaturale. Mon regard reste subjectif. Je hiérarchiserai mes préférences qui vont aux équipes Studio 08 (Italie), Finn geipel et Giulia Andi (Allemange/France) et Stirck Harbour & parteners (Royaume-Uni). Puis, il y a les projets qui me plaisent un peu moins : l’ équipe de Roland Castro (France) pour vouloir déplacer en banlieues tous les Ministères, l’agence Grumbach (France) qui ne focalise que sur la Seine-Métropole jusqu’au Havre, et les ateliers Lion groupe Descartes (France) qui mettent le paquet sur les transports de banlieue à banlieue. Et ceux qui ne me conviennent pas du tout : l’équipe AUC Djamel Klouche (France) qui soutient la ville diffuse et les choix individualistes, l’équipe MVRDV (Pays Bas) et les Ateliers Jean Nouvel (France) pour leurs projets de tours et leur côté ostentatoire et narcissique ; l’atelier Christian de Portzamparc (France) pour sa logique de marché, ses tours et son projet de train aérien au dessus du périphérique. Finalement, ceux sont les équipes européennes – hors France – qui me conviennent le mieux.
Mes favoris :
Equipe Studio 08 de Bernardo Secchi et Palao Vigano (Italie) : Elle intégre l’écologie des paysages, la mobilité et l’économie, tout en restant à l’écoute des approches sensibles, au premier rang la musique ou le cinéma. Elle définit l’agglomération parisienne commune une ville poreuse, qui donne de l’espace à l’eau, et envisage le territoire à vol d’oiseau et pas-à-pas.
Equipe Finn Geipel et Giulia Andi (Allemagne/France) : Le pari serait d’ordre mental avant tout. Elle s’attache à la ville européenne comme modèle. Elle défend l’idée d’une métropole douce et souhaite dépasser le schéma centre ville actif et banlieue dortoir. Son projet est anti-monumental, se base sur l’existant, sur le corpus de la ville. Le projet se veut très environnemental, avec des intensités vertes et des fleuves à capacité «autonettoyante» et «autorégénérative».
Equipe Stirck Harbour et parteners (Royaume-Uni) : Plusieurs centres seraient présents sur un territoire compact, bien connectée autour des platerformes de transports publics. Elle travaille aussi sur la densité, le chomâge, la répartition des emplois et la diversité ethnique. Elle préserve la ceinture verte. Elle réfléchit à une gouvernance capable de rendre des comptes.
Pour voir les dix projets en image : http://www.lefigaro.fr/culture/2009/03/12/03004-20090312DIMWWW00505-grand-paris.php