Le temps, la ville et l’urbaniste

17 décembre 2012

Compétitivité et qualité de vie sont-elles seulement conciliables ?

Publié par alias dans Finances & fiscalité

Selon Laurent Davezies, auteur de « La République et ses territoires », les lieux de croissance ne sont plus nécessairement ceux du bien-être.  Beaucoup de responsables politiques vivent encore aujourd’hui avec l’idée surannée que pour favoriser le développement de leur territoire, la seule planche de salut consisterait à dynamiser leur appareil de production, à augmenter la qualification de leur emplois, à attirer des emplois métropolitains supérieurs, sans prendre conscience que facteurs de production et facteurs de développement ne s’articulent plus nécessairement, nous dit l’auteur. Il faut pour le comprendre : « se défaire d’une certaine idéologie qui conduit à évaluer toute performance et tout situation à la lumière du seul PIB ».

Gérard Collomb pense qu’en créant des richesses, celles-ci bénéficieront aux territoires non productifs, conformément aux théories de Laurent Daviezes. On observerait des territoires riches d’un appareil productif moderne qui voient s’accumuler les problèmes sociaux, et des territoires a priori dépourvus de tels atouts où il fait plutôt bon vivre. « Conjuguée à la mobilité croissante des personnes, s’organise une circulation invisible des richesses qui remodèle en profondeur la géographie française ». En même temps que « les disparités de PIB par habitant tendent à se creuser entre nos territoires, on observe un étonnant rééquilibrage de leur revenu, de leur emploi et de leur peuplement ».

Il faudrait donc cesser de « considérer les territoires uniquement comme supports de croissance : ils sont autant de supports de redistribution, de mobilité, de consommation ». L’une des raisons de ce rééquilibrage tient à « l’existence de puissants mécanismes de redistribution du revenu liés aux prélèvements, aux dépenses publiques et aux transferts sociaux ». Les dépenses publiques représentaient 28% du PIB en 1950 et 55,4% en 2003 (56.3% en 2013). « Le plus fort changement n’a donc pas été du côté de la mondialisation mais de la mutualisation, et pourtant, on ne cesse de déplorer le retrait de l’Etat et la montée de la mondialisation libérale » (p.15). 

Gérard Collomb craint alors que le Parti socialiste ne soit enfermé dans une vision d’une social-démocratie classique « fondée sur l’intervention de l’Etat, par la redistribution et la réglementation ». Il considère que ce sont désormais les métropoles et non l’Etat qui portent la compétitivité du pays et conteste l’ingérence étatique dans la gouvernance territoriale. Ainsi critique-t-il avec fermeté les fondements du fonds de péréquation des ressources intercommunales, car cette péréquation imposée par l’Etat aux métropoles les plus riches au nom de la solidarité  (ex : FPIC, soit un prélèvement de 3,3 millions d’euros en 2013 passant à 10,3 millions d’euros en 2017, sur un budget communautaire annuel de 2 milliards d’euros) pourrait bien affecter les locomotives déjà indirectement contributives.

Ainsi, l’ampleur de cette solidarité redistributive pourrait être trop importante, trop juste pour ceux qui tirent la croissance, suivant l’adage « l’impôt tue l’impôt » (Laffer) ? L’auteur répond que ces mécanismes de redistribution sont un fait sédimentaire de civilisation à l’échelle de l’histoire. Selon la loi Wagner, la part socialisée du revenu augmente quasi mécaniquement avec le développement et la complexification des sociétés, sous l’impulsion des électeurs et des mouvements sociaux. Le standard de solidarité sociale continue de s’élever. Par ailleurs, nous dit l’auteur : « l’idée que l’impôt tue l’impôt commence à dater, apparaissent même des études alternatives comme ceux de Thomas Piketty qui illustrent plutôt les vertus économiques du prélèvement direct sur les agents disposant des plus gros revenus.» (p.20). On peut aussi se demander, nous dit l’auteur, si une pénalisation fiscale ne constitue pas  plutôt une incitation à plus d’efficacité productive (ex : abandon de certains projets pharaoniques, arbitrages budgétaires en faveur de la transition écologique…).

Si la péréquation peut, pour les pessimistes à savoir les centristes, inhiber l’initiative, on peut aussi penser qu’elle permet la prise de risque. Elle a pour effet d’étaler, d’absorber les chocs que peuvent subir certains agents ou certains territoires (p.22). « Ces mécanismes d’amortissement ont un impact économique positif ». On peut considérer que ce mécanisme de mutualisation permet d’assurer une sorte de justice de long terme par le fait de garantir demain la contrepartie de l’effort consenti aujourd’hui, il est un accélérateur du développement territorial en réinvestissant le surplus des territoires riches dans le développement des territoires pauvres. Le dilemme efficacité/égalité territoriale ne devrait pas faire couler autant d’encre selon l’auteur : « On peut, dans une même politique, viser à la fois l’efficacité avec une concentration spatiale de la production et l’égalité avec la répartition du  revenu. » (p.52). Mais c’est faire fi de la mixité fonctionnelle, de la capacité de résilience, et de l’autonomie policito-financière de chacun des territoires. Chaque territoire devrait pouvoir bénéficier d’une base économique et d’un secteur domestique (production, consommation, service public), me semble-t-il. Utopique ?

La péréquation est une question d’équilibre et de rythme, me dira-t-on, et les besoins existent aussi dans chaque métropole. Les lieux de croissance ne sont « ni les plus attractifs du point de vue des choix de résidence, ni ceux que luttent le plus efficacement contre la pauvreté, ni ceux où le revenu par habitant progresse le plus vite » selon Laurent Davezies. Si les zones productives créent du PIB, les emplois se développent plus rapidement dans les zones les moins actives, du fait de l’économie résidentielle. « Le Rhône enregistre globalement des variations de revenus décevantes entre 1990 et 2004 : On est donc loin de cette captation économique si souvent reprochée aux métropoles françaises ». Les territoires les plus productifs (PIB) génèrent désormais plus de pauvres chez eux, tout en contribuant via les transferts publics et privés de revenus, à réduire la pauvreté dans les territoires résidentiels. « Nos grandes métropoles n’ont le vent en poupe que sur le papier ». Comparées aux communautés métropolitaines, les MEIE enregistreraient des évolutions oscillant entre le médiocre et l’inquiétant (p.83). Ce que ne démontre pourtant pas le document de la  DGCL :

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Si le Grand Lyon a gagné plus de 80 000 habitants entre 2008 et 2012 (intégration de Lissieu de 3204 habitants comprise), et si le revenu médian a progressé de 4,6% de 2004 à 2009 sur l’agglomération (les prix à la consommation ont augmenté de 12,6% sur cette même période), il est vrai que des poches de pauvreté apparaissent. Tandis que certains habitants de l’ouest lyonnais tenus par les centristes s’enrichissent, les habitants de Vénissieux enregistrent une baisse de 4% de leur revenu médian ; la diminution étant encore plus marquée pour les ménages modestes, selon l’observatoire de la cohésion sociale et territoriale de l’Agence d’urbanisme. « Ce qui fait problème à gauche, ce ne sont pas les finalités, mais les moyens » écrira Gérard Collomb. « La politique de gauche dans ses fins, conduite par la droite dans ses moyens, voilà au fond le point d’équilibre idéal des électorats européens aujourd’hui » (p.54).  Et les centristes à la tête du Département de répondre sur la dotation de solidarité communautaire (DSC, soit 20,4 millions d’euros en 2013 sur un budget communautaire de 2 milliards d’euros) : ils n’avaient qu’à créer des zones d’activités, on ne va pas tout de même toujours ponctionner les mêmes ! Sauf que les revenus dans les quartiers CUCS prioritaires sont deux à trois fois inférieurs que dans le reste de l’agglomération lyonnaise.

Alors que les inégalités de revenu ont eu tendance à décroître entre nos régions et nos villes, elles ont augmenté à l’échelle fine de nos agglomérations, selon Laurent Davezies. « Au niveau national, dominent des grandes machines collectives, économiques et sociales, qui permettent la convergence des revenus, à l’échelle locale, ce sont les comportements ségrégatifs des ménages qui défont la cohésion sociale et locale – souvent relayés  par les stratégies des élus locaux ». Dans le registre du développement humain et de la cohésion sociale, c’est à l’intérieur de nos métropoles que les situations se dégradent de la façon la plus inquiétante (p.108). Pourtant, la péréquation communautaire peut et pourrait davantage s’opérer sur les grandes politiques générales (foncier, aménagement, développement, financement de droit commun en plus des crédits spécifiques sur les quartiers politique de la ville) et les fonds de concours (équipements), voire les dotations (DSC..). Pour développer une agglomération plus solidaire, sans doute faudrait-il revoir le mode de scrutin des élus communautaires, afin que ces derniers puissent être choisis sur un projet plus fédérateur.

23 avril 2012

Externalisation et monétarisation des risques (PPP) ?

Publié par alias dans Finances & fiscalité

La philosophe politique Cynthia Fleury, dans son ouvrage « La fin du courage », publié chez Fayard en 2009, écrira « J’ai perdu le courage comme on égare ses lunettes. Aussi stupidement (…). Le courage détermine le contemporain qui perçoit l’obscurité de son temps comme une affaire qui le regarde et n’a de cesse de l’interpeller. »

Elle se réfère à Jankélévitch, lequel estime que le courage est la vertu qui rend les autres vertus opérantes, il relève de la décision pure, celle qui fait origine. Le courage serait donc une maxime de l’action, de ce que l’on doit faire sans le déléguer à l’autre. Sans morale, point de courage, et sans courage, plus de véritable démocratie. Pour reprendre courage, il faudrait cesser de glisser, retrouver la vitalité, chercher la force là où elle se trouve.

Lorsque les pouvoirs publics transfèrent le portage des risques au secteur privé, manquent-ils de courage politique ? Certains justifieront ces transferts de responsabilité en invoquant une supériorité technique du secteur privé, un système d’incitations et de sanctions faisant défaut au secteur public, une flexibilité accrue, en somme, une meilleure performance… L’Etat providence s’efface ainsi devant le secteur assurantiel…

Existerait-il une forme d’aversion des collectivités face aux risques, bien que conçues initialement afin de les mutualiser ? Seraient-elles des clientes parmi d’autres, tel des agents privés, regardant leur propre intérêt économique et immédiat ? L’administration, serait-elle, comme les individus, prête à accepter des risques volontaires plus de mille fois supérieurs aux risques involontaires, prenant alors plus facilement le risque du seul PPP ? Tandis que l’individu peut s’autoriser une prise de risque individuelle susceptible de réduire sa sécurité, il/elle demandera-t-il/elle à être davantage sécurisé(e) quand il/elle n’aura pas la maîtrise du risque ?

Selon Ulrich Beck, dans son ouvrage « La société du risque » paru en 2001 aux éditions Aubier, les sociétés modernes produisent en même temps richesse et risques, lesquels seront davantage pris en compte en raison de la nécessité de maîtriser les effets des développements technologiques, des transports et de la globalisation des échanges ; ces nouveaux risques sont souvent imperceptibles et sans responsable précis. Selon l’anthropologue Mary Douglas, les agents publics respectent le savoir scientifique et institutionnel produit par les experts légitimés par les autorités ; ils sont à la fois risquophobes en raison de la crainte qu’ils nourrissent des perturbations de l’ordre social et aveugles au risque par effet de structure.

Etat paradoxal qui, en imposant davantage de normes sécuritaires, contribue au sentiment d’insécurité des collectivités, lesquelles se tournent vers le privé. L’externalisation des risques pourrait révéler également une contre-réaction à l’inflation normative. La solution du « contrat global de partenariat » leur permettrait  de déléguer plus facilement au privé la mise en œuvre de nouvelles normes, tout en gardant la maîtrise des recettes, à la différence d’une concession. L’inflation normative participerait-elle de la RGPP au pire, au mieux  au renforcement du contrôle de gestion afin de pallier aux asymétries d’information ? A mesure que croît le sentiment d’insécurité s’accroît également diverses formes de contrôle.

La collectivité serait donc disposer à souscrire des emprunts à des taux d’intérêt supérieurs à ceux qu’elle aurait eu à verser en souscrivant un prêt directement en gérant l’équipement en régie, ceci afin de se dédouaner des risques encourus - risques techniques/naturels et juridiques essentiellement - tout ceci, au grand bonheur des actionnaires et au grand damne des fonctionnaires. Sommes-nous finalement irrationnels dans notre rapport au risque ?

23 avril 2012

Chambre régionale des comptes et modes de gestion (allotissement)

Publié par alias dans Finances & fiscalité

Dans son article du 9 avril 2012 « des concessions pour apaiser les éboueurs du Grand Lyon », la Gazette des communes indiquait que « La communauté urbaine de Lyon avait choisi sa nouvelle répartition (de la collecte) pour répondre à la Chambre régionale des comptes recommandant de stimuler la compétitivité public-privé. ».

Cet article laisse à penser que la Chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes aurait souhaité renforcer la compétition entre le secteur public (régie) et le secteur privé (marché public) et aurait émis, en ce sens, un avis d’opportunité quant au mode de gestion souhaitable; la Gazette laissant même planer un doute en titrant son article « des concessions » (délégation de service public). Or, il n’en est rien.

Dans son rapport, la CRC s’est référée à une «note d’expertise du processus de passation des nouveaux marchés pour la collecte des déchets ménagers et le nettoiement des marchés alimentaires et forains» réalisée par des experts (?) mandatés par la Communauté urbaine en juin 1999 ; les précédents marchés de collecte venant à terme au 31 décembre 1999.

Devenus AMO, les «experts »  rédigèrent une «note d’orientation» le 27 avril 2000 et un « rapport de phase 1″ en mai 2000 : Le Conseil communautaire en retint la préconisation suivante d’un nombre de lots réduit à quatre (hors collecte sélective) de taille très inégale, contre une douzaine auparavant. La Courly était alors présidée par R. Barre (Centristes).

Ainsi, un très gros lot a été créé, de telle sorte que les plus grandes entreprises du secteur sachent qu’une seule d’entre elles l’emporterait, visant ainsi à rendre la concurrence plus vive ; deux autres lots de taille nettement plus faible devaient permettre le maintien d’une implantation de plusieurs entreprises sur le territoire du Grand Lyon, dans l’optique d’une future remise en concurrence. Enfin, la possibilité de faire entrer de nouveaux venus était évoquée, ce qui correspond vraisemblablement à l’existence d’un 4e lot encore plus petit. 

Or, constatent les magistrats financiers : « la comparaison de l’implantation des différentes entreprises avant et après cet appel d’offres montre cependant que cette implantation a peu bougé et qu’elle a probablement même subi les modifications les plus faibles possibles compte tenu du nouveau découpage territorial et de l’appartenance de plusieurs entreprises aux mêmes groupes industriels. Si c’était le cas, cela signifierait qu’en fin de compte, et à l’opposé des espoirs des organisateurs de l’appel d’offres, la concurrence n’a pas été le critère déterminant de la nouvelles répartition des entreprises ».

La Chambre régionale des comptes s’est effectivement exprimée sur  la stratégie d’allotissement, mais ayant pour objectif, je cite, « de mettre en défaut une éventuelle entente implicite entre entreprises (p.19) ». Elle indique ainsi tout au plus la nécessité de remettre en compétition les entreprises privées entre elles, ceci afin d’éviter les pratiques anticoncurrentielles du secteur privé.

Souvent instrumentalisés, rappelons à tout égard que les magistrats des chambres régionales des comptes n’émettent pas d’avis en opportunité, lesquels relèvent de l’entière responsabilité des exécutifs locaux, voire même de leur fameux conseils «experts – AMO»…

19 avril 2012

Le projet urbain partenarial (PUP)

La loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et de lutte contre l’exclusion a introduit le projet urbain partenarial (PUP), un outil contractuel de préfinancement des équipements publics par les constructeurs ou aménageurs, nécessaires aux futurs usagers. Le décret d’application est sorti le 22 mars 2010.

Rappelons brièvement les intentions du législateur, lequel a souhaité faire appel au secteur privé afin de pouvoir faire face à la crise du logement – notamment eu égard aux désastreuses ventes à la découpe (ex groupe Gecina), répondre à l’urgence et endiguer les situations d’exclusion et de grande précarité.

Cet urbanisme opérationnel d’initiative privée (PUP) se différencie du Programme d’aménagement d’ensemble (PAE), d’initiative purement publique mais ne pouvant être modifié, ainsi que de la Zone d’aménagement concertée (ZAC). Au sein d’un PUP, les constructeurs et aménageurs disposent de la maîtrise foncière et financent l’équipement public, lequel est réalisé par la collectivité/EPCI.

Bien que recommandé par certains techniciens dans le cadre du projet « Grand Stade », le code de l’urbanisme (article L 332-11-3) exclut toutefois le recours au PUP en zone agricole ou en zone naturelle et forestière, ce qui fait qu’une telle option n’aurait pu être retenue dans le cadre de l’OL Land, sauf à modifier le zonage des parcelles classées A et N en zones AU ou U avant de réaliser les préemptions (nb : cette  disposition aurait été moins défavorable aux agriculteurs évincés).

Le recours au PUP implique la présence d’une ou de plusieurs opérations d’aménagement ou de construction dans un périmètre délimité, induisant une opération d’une certaine ampleur. Le PUP ne permet qu’une contractualisation du financement des équipements publics (ex tram T3) à l’exclusion des équipements propres (Grand Stade privé), lesquels ne sont réalisés que dans l’intérêt exclusif d’une opération d’aménagement ou de construction (OL Land).

Les équipements publics (T3) doivent excéder les besoins  du seul propriétaire. Ainsi, le contrat de PUP exclut les travaux nécessaires à la viabilité et à l’équipement de la construction, du terrain d’aménagement, notamment en ce qui concerne la voirie, l’alimentation en eau, gaz et électricité, les réseaux de télécommunication, l’évacuation et le traitement des eaux et matières usées, l’éclairage, les aires de stationnement, les espaces collectifs, les aires de jeux et les espaces plantés (C.urb., art L 332-15).

Par contre, en application des principes de « lien direct » et de « proportionnalité », un PUP pourra financer les travaux de voirie tels que la réalisation de carrefours ou de ronds points, ou encore de travaux concernant l’extension de réseaux d’assainissement, d’eau ou d’électricité dont la longueur excède 100 m. La convention pourra mettre à la charge des propriétaires fonciers, des aménageurs ou des constructeurs, que le coût des équipements publics (T3) répondant aux besoins des futurs usagers des constructions à édifier (Grand Stade) dans le périmètre fixée par la convention ou lorsque la capacité des équipements programmés (T3) excède ces besoins (OL Land), la fraction du coût proportionnelle à ceux-ci (C.urb. art. L 332-11-3).

Ainsi, la collectivité/EPCI se doit d’indiquer la liste des équipements publics (TC) qu’elle s’engage à réaliser pour répondre aux besoins des futurs usagers des constructions projetées. Les propriétaires, constructeurs ou aménageurs doivent en contrepartie préciser l’opération d’aménagement ou de construction qu’ils souhaitent entreprendre. Le contrat détermine le montant des participations à payer par les personnes privées et celui qui restera à la charge de l’administration (participation pour le débranchement de T3 au Grand Stade chiffré à 33 M€ / versus TLE – future taxe d’aménagement – actuellement évaluée à 4.5 M€ sur 2 ans, soit 22.5 M€ sur 10 ans - l’exonération ne pouvant excéder 10 ans).

Le paiement par les opérateurs privés peut s’effectuer soit sous la forme d’une contribution financière, soit par des apports de terrains bâtis ou non bâtis. La participation des constructeurs ne peut se faire sous la forme de travaux réalisés pour le compte de la commune (ex : éclairage sur Chassieu), car dans ce cas, une procédure de mise en concurrence s’impose. Le régime juridique du PUP permet aux collectivités/EPCI d’organiser, à leur avantage, le financement par des personnes privées de tout ou partie des équipements publics rendus nécessaires par des opérations d’aménagement ou de construction.

17 avril 2012

Les contrats de partenariat (PPP)

L’ordonnance du 17 juin 2004 relative aux contrats de partenariat dit « ordonnance PPP » est le fruit de l’habilitation donnée par le législateur au gouvernement (loi du 2 juillet 2003), permettant à l’administration de souscrire des « marchés publics dits complexes ».

Ce texte permet à la puissance publique de confiée à des personnes privées, par des contrats globaux, la réalisation et/ou la gestion d’ouvrage ou de services (conception, réalisation, transformation, exploitation, financement, ou une combinaison de ces différentes missions).

Les contrats de partenariat offrent aux collectivités, une réponse dans un cadre budgétaire contraint, une économie de temps, permettent également de privilégier une gestion de prestations intégrées comprenant, si le contrat le prévoit, l’entretien de l’équipement ; mais ils soulèvent des questions relatives à l’égalité d’accès des entreprises à la commande publique, interrogent la protection des propriétés publiques et le bon usage des derniers publics.

Dérogatoires au droit commun, plusieurs critères permettent de recourir aux PPP. Si l’urgence (ressources : autorité) puis la technicité des projets (ressources : organisation) semblent avoir été dans un premier temps soulevées, le critère relatif à l’économie (ressources : finances) semblent à présent prendre le pas, avec comme toile de fond, la recomposition de l’Etat et son corollaire, la privatisation des territoires urbains (ressources : modalités. ex : constructions de collèges par les Conseils Généraux).

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En effet, l’ordonnance de 2004 permet de déroger à certaines dispositions du Code des marchés publics (lequel interdit de différer le paiement d’un ouvrage au delà de sa réalisation) et de la loi MOP du 12 juillet 1985 (laquelle interdit à la personne publique de se défaire de sa qualité de maître d’ouvrage).  La collectivité rémunère le co-contractant par un prix, tout au long de l’exécution d’un contrat de longue durée, en n’étant pas maître d’ouvrage.

D’autres outils juridiques PPP autorisant la dévolution à un partenaire de la conception et/ou exploitation d’ouvrages existent, tels que l’autorisation d’occupation temporaire (AOT, loi du 25 juillet 1994) et le bail emphytéotique administratif (BEA, loi du 21 février 1996). Par la suite, il fut autorisé de cumuler les fonctions de conception et de réalisation à celle d’entretien de l’ouvrage (équipement sécurité intérieure, loi LOPSI du 29 août 2002 ; justice, loi LOPJI du 9 septembre 2002 ; défense, loi de programmation du 27 janvier 2003).

Dans sa décision du 26 juin 2003, le Conseil Constitutionnel autorisa la généralisation de telles dérogations au droit commun de la commande publique, à condition qu’elles répondent à des motifs d’intérêt général, tels que l’urgence, qui s’attache en raison de circonstances particulières ou locales à rattraper un retard préjudiciable, ou la nécessité de tenir compte des caractéristiques techniques, fonctionnelles ou économiques d’un équipement/service. Les critères retenus sont donc celui du co-financement, de l’urgence et de la technicité.

Ainsi, l’urgence permettant de brûler les étapes et de rattraper le temps perdu a pu être établie lorsque l’ordre public, la sécurité des personnes et des biens, l’égalité devant la justice, la nécessité des peines, la santé et la dignité des personnes incarcérées et la continuité de  divers services publics aurait été autrement gravement mise en cause (loi Lopsi et Lopji).

Dans sa décision du 29 octobre 2004, le Conseil d’Etat a précisé la condition alternative (urgence ou complexité du projet) permettant le recours au PPP.  La complexité du projet doit être telle que l’administration n’est pas objectivement en mesure de définir seule et à l’avance les moyens techniques pouvant répondre à ses besoins ou d’établir son montage financier ou juridique.

L’instrument ayant peu de succès, la loi du 9 juillet 2008 a tenté d’étendre le périmètre des PPP aux projets présentant un bilan entre les avantages et les inconvénients plus favorable que les autres contrats, et en établissant une présomption d’urgence élargie aux infrastructures de transport, à la rénovation urbaine, à la mise en accessibilité, à l’efficacité énergétique…

Dans sa décision du 24 juillet 2008, le Conseil Constitutionnel estimera que les PPP doivent rester exceptionnels : Ils demeurent possibles lorsqu’il est explicitement démontré, par une analyse approfondie, que leur bilan économique est plus favorable que celui des autres contrats. Le bilan économique de ces PPP reste toutefois à ce jour encore à démontrer (cf bilan du symposium sur les PPP, ENA, 9 juin 2009 ; prépa ENA, IPDGE/MINEFI, avril 2012).

Par exemple, lorsque le modèle économique consiste à faire financer une infrastructure en PPP (TOP) chiffrée à 2.5 milliards d’euros, en pensant que les recettes de péages pourront rapporter 1 Mds d’euros, alors que les bénéfices des péages voisins (BPNL) se chiffrent en moyenne  à 14 M d’euros/an sur 10 ans, on en déduit qu’il faudrait alors plus de 70 ans et non 15 pour solvabiliser l’infrastructure. Le modèle économique n’est donc pas viable car aucune banque ne prête sur des durées aussi longues (en principe, 10 ans maxi, seules 3 banques suivent jusqu’à 20 ans), à moins de démontrer que les flux  seront 5 fois plus importants sur la nouvelle infrastructure.

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Dans leur article « de l’innovation instrumentale à la recomposition de l’Etat » de janvier 2010, Pierre Lascoumes et Patrick le Galès expliquent que chaque annonce d’une nouveauté instrumentale (les PPP) est en général accompagnée de trois grands types de justification :  

1. Elle se veut d’abord un geste politique, elle cherche à produire un effet symbolique d’autorité, de rupture avec les actions antérieures. Or, on constate que le pouvoir judiciaire cherche à juguler l’enthousiasme des exécutifs pour ces nouveautés à caractère dérogatoire.

2. Elle traduit aussi une recherche d’efficacité. La rupture énoncée se veut d’abord une solution à l’échec des instruments d’actions antérieurs. « Le changement dans les moyens d’action se veut donc rationnel, même s’il s’agit souvent d’un postulat non démontré. ».

3. La rationalité de l’innovation est aussi axiologique, c’est-à-dire porteuse de valeurs dont l’introduction est censée renouveler ou enrichir l’action publique : la modernisation, la déréglementation et l’ouverture au marché…

Si les instruments législatifs et réglementaires (ordonnance) continuent d’emprunter des formes légales routinisées qui constituent l’archétype de l’interventionnisme d’Etat, les nouveaux types d’instruments (PPP), moins dirigistes, sont basés sur la communication et la concertation (Mission MAPPP).

L’Etat devient animateur ou coordinateur (actions de mobilisation, d’intégration et de mise en cohérence). « Ces nouveaux instruments tirent davantage leur légitimité de l’image moderniste et surtout libérale de l’action publique dont il est porteur, que de leur efficacité réelle qui est d’ailleurs rarement évaluée (Gaudin, 1999). ». Reste aussi à l’Etat les instruments communications et informatifs (ex saisine de la CNDP).

Selon les auteurs, c’est essentiellement l’invalidation des instruments anciens qui est porteuse des transformations. Ils démontrèrent « à quel point les jeux successifs de substitution des instruments de financement des collectivités locales en Grande Bretagne ont permis de maintenir et en partie de dissimuler une politique constante de restriction budgétaire ; cette manipulation rapide des instruments révéla un bonneteau gouvernemental bien assumé ».

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Certaines collectivités peuvent être attirées par ces nouveaux instruments. On imagine cependant mal comment une collectivité pourrait à la fois déclarer ne pas être en mesure de pouvoir gérer la « complexité du projet » et donc d’établir « son montage financier et juridique », quoiqu’en mesure de « négocier le contrat » à son avantage ?

Quant à l’urgence, lorsque l’on met plus de 10 ans pour mettre aux normes certains équipements/infra (tunnels), peut-on encore sérieusement invoquer l’urgence sans évoquer une faute de gestion (provision pour amortissement, GER ?).

Rappelons juste au passage que les clauses relatives aux gros entretiens et renouvellement prévoient en principe de renouveler les ouvrages au fil de l’eau, de lisser les dépenses, de limiter les interventions d’urgence et de respecter les obligations réglementaires suivant l’instruction technique pour la surveillance et l’entretien des ouvrages d’art (circulaire du 16 février 2011 relative à la publication de la nouvelle ITSEOA, laquelle a remplacé l’instruction de 1979 modifiée en 1995 + guide technique : tunnels – tranchées couvertes – galeries de protection).

L’appât serait plutôt d’ordre purement financier : où trouver les crédits pour financer de lourdes infrastructures, renvoyant à notre vision politique/stratégique du développement urbain. De plus, Certains diront que les PPP présentent l’avantage de ne pas considérer les travaux comme des investissements (pas d’incidence sur la PPI). Outre le fait que le raisonnement est quelque peu inquiétant, ne tenant pas compte du principe de « sincérité » et donc de la prévisibilité budgétaire (hors PPF), ceci n’est pas tout à fait juste : La consolidation dépend du portage politique (avis du CNOCP) et du portage du risque (avis d’Eurostat).

Concernant le portage politique, l’avis du CNOCP dit ceci : « L’équipement défini au contrat entrant dans le champs d’application de l’avis est comptabilisé en tant qu’immobilisation corporelle au bilan de l’entité publique lorsqu’il est contrôlé par celle-ci ». Le contrôle comprend : « la maîtrise des conditions d’utilisation de l’équipement, ainsi que la maîtrise du potentiel de service et/ou des avantages économiques futurs dérivés de cette utilisation ».

En général, sur des infrastructures déjà existantes, le contrôle de la collectivité est réputé déjà exister, ce qui induit une consolidation au budget. Lorsque le coût de l’équipement ne peut être déterminé de façon fiable, sa comptabilisation est reportée au moment où l’entité publique évalue son coût de manière fiable (par exemple, lors de la mise en service du bien).

Concernant le portage du risque, selon F. Marty de l’OFCE, quand le privé maîtrise la classe de risque relative à l’équipement, ce dernier peut porter le risque dans la mesure où ses capacités et son expérience de contrats comparables lui permet de le gérer plus efficacement. Par contre, pour des contrats de montants trop élevés pour la surface financière d’une entreprise donnée ou portant sur des équipements dont la réalisation ou l’exploitation seraient trop risquées, la collectivité, en tant que meilleure mutualisation des risques, doit intégrer l’opération dans ses comptes.

  • Risque de construction (dépassements de délai et de coût, non respect des normes spécifiés ou incapacité du prestataire à réaliser l’équipement). Si la collectivité est tenu de débuter ses paiements indépendamment de la fourniture du service, si elle vient à en modifier les spécifications ou à apporter son concours au prestataire, elle est réputée assumer le risque de construction. Si la collectivité exerce une influence déterminante sur la conception de l’infrastructure et la définition des services que celle-ci pourra rendre, elle sera réputée détenir le contrôle économique de l’actif et devra donc le consolide.
  • Risque de demande : la collectivité est réputée supporter le risque si ses paiements son indépendants du niveau effectif de la demande des utilisateurs finaux. Dans pareil cas, le prestataire est exonéré du risque du marché. Les effets des garanties publiques sont des risques « contingents » : Le risque doit être consolidé si la collectivité garantit au partenaire privé un niveau donné de retour sur investissement quelle que soit l’utilisation effective du service fourni. A contrario, plus la part des revenus en provenance de tiers est élevé dans les flux totaux, plus forte sera la présomption d’un contrôle économique par le partenaire privé.
  • Risque de disponibilité et obsolescence de l’infrastructure (Incapacité du prestataire à fournir le volume d’équipement, le niveau ou la qualité du service contractuellement prévus.) La collectivité est réputée supporter le risque si elle ne peut appliquer des pénalités significatives au prestataire. Si à contrario, elles sont suffisamment élevées, le partenaire privé est effectivement en risque.
  • Risque de valeur résiduelle à l’issue de la période contractuelle. Cela concerne les dispositions relatives au devenir de l’actif en fin de contrat. Si la collectivité a une obligation de rachat hors du marché ou si elle a payé le bien au travers de redevances annuelles surestimées par rapport au prix de la prestation, le contrat est consolidé. Mais si in fine, le bien reste propriété du prestataire et s’il garde une valeur économique significative, le contrat est déconsolidé. Il en  va de même si la collectivité détient une option d’achat du bien à la valeur du marché.

***

Si l’on considère que le PPP doit être consolidé dans les comptes de la collectivité, un arrêté du 16 décembre 2010 relatif à l’instruction budgétaire et comptable M14 précise qu’à compter de l’exercice 2011, l’instruction budgétaire et comptable M14 annexée et l’arrêté du 27 décembre 2005 modifié est modifiée de la façon suivante :

Acquisition d’une immobilisation par voie de contrat de partenariat public privé.
« La partie de la rémunération des contrats de partenariat public privé représentant la part investissement versée avant la mise en service du bien est enregistrée au débit du compte 235 « Part investissement PPP » (opération réelle). Lors de la mise en service du bien objet du contrat de PPP, le bien est intégré au compte 21 approprié pour sa valeur totale correspondant au coût d’entrée chez le partenaire privé. La contrepartie est enregistrée par opérations d’ordre non budgétaire : au compte 235, pour la part investissement d’ores et déjà payée ; au compte 1675 pour la part investissement restant à payer.

Les travaux soulignent que le choix d’un PPP peut participer d’une logique d’opportunisme budgétaire visant à éviter de rendre compte des investissements publics. Ainsi, une collectivité plus soucieuse de préserver la structure de son bilan (même artificiellement) que de maximiser l’efficacité économique du contrat, peut accepter de rémunérer de façon déraisonnable le prestataire privé pour la prise en charge de quelques risques additionnels de façon à faire retomber son exposition sous la barre fatidique des 50%.

De même, il est arrivé qu’un contractant public ait minimalisé artificiellement la charge annuelle liée à la signature du contrat, en définissant une durée d’étalement des paiements dépassant la durée de vie économique des biens ou en optant pour une amortissement financier à annuités progressives, permettant d’imputer en fin de contrat la part la plus significative des remboursements.

En conclusion, les résultats dépendent fortement des hypothèses retenues, et quelques points d’écart sur un taux suffisent parfois à inverser les conclusions du bilan comparatif, selon Gaëtan Huet de « Partenaires finances locales ».  Cela soulève des problèmes méthodologiques en matière de monétarisation du risque et explique sans doute la difficulté actuelle que rencontrent les pouvoirs publics afin d’évaluer correctement l’instrument « PPP ». Tout dépend de la qualité de la négociation initiale…et de celle des négociateurs. 

29 novembre 2011

Les emprunts toxiques ou le « tout bénéf. » du Garde des Sceaux

Publié par alias dans Finances & fiscalité

Les 2e rencontres nationales « risques et secteurs publics » avaient pour objet de mettre en garde les élus face aux risques financiers. Selon la DGCL, le risque ne porte pas tant sur un défaut de paiement mais sur un stress financier, exacerbé en cas d’aléas ou de désactivation des sécurités internes et contournement des sécurités externes, faits au demeurant très rares, mais c’était sans compter sur les propos tenus par Michel Mercier devant l’AMF, l’AMGVF, le SNDG, les CRC, la CDC, l’ENA, la CNFPT, la DGCL ce 14 mai 2009…

Chacun put constater, à l’exception de Michel Mercier, à la fois une crise de liquidité (besoin d’un interventionnisme pour assurer le crédit interbancaire) et une crise d’information (besoin de réglementation des produits indexés en évitant les produits exotiques). L’AMF s’était alors prononcée pour l’aménagement d’un code de bonne conduite, lequel intégrerait un classement des différentes catégories d’emprunts selon les risques et renforcerait l’information.

Michel Mercier, Président du Conseil Général du Rhône, tint ce jour un propos fort différent : « Les emprunts structurés, dont on mesure mal l’impact positif ou négatif à moyen terme, ont permis d’importants efforts d’investissement, d’autant que leur taux d’intérêt frôlait le niveau de l’inflation : du tout bénéf. pour nos collectivités », conseillera-t-il ainsi à ses homologues d’un air taquin et enjoué. Effectivement, d’autres élus locaux l’accompagneront dans ses péripéties : Saint-Étienne, Oullins, Feyzin, Sathonay-Camp, le CG de l’Ain…avant de se faire convoquer par Claude Bartolone

Pour autant, ce 14 mai 2009, André Barbé, Conseiller maître à la Cour des comptes, estima nécessaire d’apporter une petite précision : Le problème vient lorsque l’endettement a été contracté sur des fonds exotiques, hors zone euros, mais les collectivités qui se trouvent piégées par les emprunts structurés n’étaient déjà pas en très bonne santé. Le magistrat financier attirera plus longuement l’attention des élus sur les risques inhérents à la prévision budgétaire…

Depuis lors, les médias se firent largement écho des 396 millions d’euros d’emprunts toxiques contractés par Michel Mercier. Le risque pour le Conseil Général est important puisqu’il se pourrait que le surcoût financier soit de 30 millions selon les Centristes, de 100 millions d’euros selon UMP, de 370 millions d’euros selon le PS, donnant ainsi raison aux représentants de la Cour des comptes.

A cela s’ajoute les surcoûts, les fameux aléas dont parlait la DGCL, concernant le musée des Confluences dont le Conseil Général est maître d’ouvrage : Le coût du musée estimé à 60 millions d’euros en 2001 serait passé à 220 millions d’euros, sachant que le montant des impôts locaux du Rhône représente 512 M d’euros en 2011.

L’affaire au niveau local commença lorsque le Département emprunta 1,2 milliard de francs en 1995 avec Dexia via des emprunts structurés, ceci afin de payer en quatre jours le périphérique nord, suite à une décision de justice gagnée par EELV (Etienne Tête), crise pétrolière et environnementale oblige.

Devenu Ministre de la Justice, le gouvernement considérant sans doute qu’il fallait bien lui récompenser ses bons et loyaux services, le Président du Conseil Général est à présent bien mal en point. Ce dernier aurait mieux fait de prendre en considération les recommandations et mises en garde formulées par les magistrats de la Cour des comptes, à moins que le Garde des Sceaux ne considère, de nouveau, que la suppression des magistrats financiers soit aussi du « tout bénéf ».

Rappelons que le projet de loi initié par Philippe Seguin devait permettre aux magistrats de sanctionner les élus locaux ou des Ministres en cas de mauvaise gestion, or Michel Mercier fit supprimer cet amendement cet été, tout en imposant aux Chambres régionales une mauvaise cure d’austérité, en ces temps d’incuries, certes bancaires, mais aussi politiques. Il revient à présent aux électeurs et à leurs représentants de dessiner l’avenir…

28 octobre 2011

De la régulation budgétaire hivernale…

Publié par alias dans Finances & fiscalité

Que faire lorsque la somme des crédits annuels nécessaires pour mener à bien l’ensemble des projets inscrits au plan de mandat s’avère être supérieure au montant prévu à la PPI ? L’une des solutions, hors compression des dépenses ou augmentation de la fiscalité et de la politique tarifaire, consisterait à retarder l’exécution des chantiers et geler les dépenses y afférentes…

La régulation budgétaire est une pratique ancienne visant à geler des crédits pour mieux piloter l’exécution budgétaire. L’ordonnance de 1959 autorisait ce gel à condition que les crédits votés soient devenus sans objet en cours d’année. Dans la pratique, la mise en réserve officielle ou informelle de ces crédits procédait moins d’un tel constat de défaut d’emploi, que de la volonté de piloter précisément le niveau des dépenses afin de ne pas dépasser la norme fixée ou d’éviter toute dégradation de l’exercice budgétaire.

Cette pratique a fait l’objet de nombreuses critiques, malgré les tentatives des directions financières au début des années 2000 de contractualiser avec chaque direction gestionnaire sur le niveau de la régulation. Les critiques concernaient autant l’acte unilatéral de la direction des finances, laquelle remettait au passage en cause le vote de l’assemblée délibérante, que de l’absence de visibilité sur l’utilisation possible des crédits, ou que la remise en cause des promesses et annonces électorales.

Depuis, la lolf dans son article 14 a institutionnalisé la régulation budgétaire, en intégrant notamment la prise en compte des conditions économiques et la nécessité pour l’exécutif de piloter l’exécution budgétaire, mais aussi le droit à information de la commission des finances/comité budgétaire avant tout acte visant à rendre les crédits indisponibles (amendement Lambert), ainsi qu’une limitation de ces annulations à hauteur de 1,5% des crédits ouverts, et l’obligation de retourner devant l’assemblée délibérante si ce plafond s’avérait insuffisant.

Si l’esprit de la lolf consacre bien la régulation budgétaire, elle ne répond cependant que partiellement aux critiques sur les conditions de mises en œuvre. Le rapport Lambert et Migaud précisera alors qu’il  « convient de tout mettre en œuvre pour limiter le recours à la régulation des crédits en cours de gestion et pour éclaircir l’horizon des gestionnaires sur les moyens dont ils peuvent disposer. ».

En juillet 2005, sera ajouté un article 51-4 bis à la loi organique, si bien que l’on peut considéré corrélativement qu’il devrait être joint au budget primitif des collectivités concernées, une présentation des mesures envisagées pour assurer en exécution le respect du plafond global des dépenses du budget général voté par l’assemblée délibérante, indiquant en particulier, pour les programmes dotés de crédits limitatifs, le taux de mise en réserve prévu pour les crédits ouverts sur le titre des dépenses de personnel et celui prévu pour les crédits ouverts sur les autres titres. Ainsi, la réserve de précaution doit être constituée au niveau du programme.

De même, dans la PPI, la constitution de réserve de précaution devrait faire apparaître une hiérarchisation dans les dépenses du  programme, hors dépenses obligatoires. Ceci offrirait alors un gage de visibilité pour l’ensemble des acteurs du processus budgétaire.

27 mars 2011

Les trois fonds de péréquation horizontale

Publié par alias dans Finances & fiscalité

Suite au rapport Durieux portant « Evaluation de l’impact de la réforme de la taxe professionnelle sur la fiscalité des collectivités locales et sur les entreprises », la loi de finances pour 2011 a créé trois fonds de péréquation entre collectivités territoriales.

La péréquation horizontale consiste à écrêter les recettes des collectivités les plus riches au bénéfice des plus pauvres. Difficile de ne pas soutenir une telle démarche dans un Etat républicain affichant la fraternité, entendez la solidarité, aux frontons de ses hôtels, et pourtant, cela n’est pas si simple qu’il n’y paraît. 

Si le mode de calcul  du fonds relatif aux droits de mutation à titre onéreux (DMTO) semble stabilisé, le mode de calcul portant sur les fonds relatifs à la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) et aux recettes fiscales intercommunales et communales (FNPRIC) devront être précisés d’ici juin. Et si la péréquation horizontale ne reposera pas sur le potentiel fiscal mais bien sur le potentiel financier (recettes fiscales + dotations de l’Etat), la question de la prise en compte des charges/dépenses reste à ce jour entière concernant le FNPRIC.

Le fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) perçus par les départements : une forte volatilité ?

Ce fonds représente 365 M d’euros sur un produit global de 7 Mds d’euros devraient être redistribués entre départements.  

Y sont contributeurs les conseils généraux dont le montant de DMTO perçus l’année précédente est supérieur de 0,75 fois le montant moyen par habitant des droits perçus par l’ensemble des départements la même année. Un second prélèvement est opéré pour les conseils généraux dont les DMTO de l’année n sont supérieurs à la moyenne de ceux en n-1 et n-2 multiplié par deux fois l’inflation (péréquation sur les flux). Il s’élève à la moitié du surplus constaté. Ces prélèvements sont plafonnés à 5% des droits perçus l’année précédente. En sont bénéficiaires, les départements dont le potentiel financier est inférieur à la moyenne.

Parmi les principaux contributeurs, Paris (66 M d’euros), les Hauts de Seine (38 M d’euros) et les Yvelines (24 M d’euros). A l’occasion du dernier club des finances des collectivités, Gilles Carrez n’a pas manqué de sermonner doctement le Département de Paris, lequel aurait œuvré pour faire baisser sa contribution ; l’attitude du Département du Rhône a également défrayé la chronique pour la même raison…

La péréquation ne semble en effet pas très forte, mais il faut tenir compte du fait que les conseils généraux sont fortement contraints dans leurs dépenses sociales et que leur pouvoir fiscal ont été diminué de moitié. En effet, les conseils généraux sont moins des institutions de projets (voirie) que de gestion (RSA, APA), mettant en application des politiques largement définies et encadrées par le pouvoir central, lesquelles, de surcroît ne sont pas compensées spontanément et nécessitant un fort lobbying local (attente d’une loi de finances rectificative).

Je pense aussi que la volatilité des DMTO ne facilite pas un fort niveau d’engagement des collectivités considérées comme aisées, mais sans doute faut-il voir dans ce fonds une forme de sécurité collective, à condition que le marché immobilier ne s’effondre pas brutalement partout. Le succès de la péréquation dépendra inévitablement de notre politique immobilière (de l’habitat).

Le fonds de péréquation sur les recettes fiscales intercommunales et communales (FNPRIC) pour 2012 : vers une consolidation sur le modèle du FSRIF.

La loi de finances prévoit la création d’un fonds national de péréquation des recettes fiscales intercommunales et communales à compter de 2012. Le montant devrait progressivement atteindre 2% des recettes fiscales du bloc communal en 2015.

Les contributeurs seront les communes et EPCI dont le potentiel financier par habitant est supérieur à une fois et demie celui moyen par habitant. Le fonds sera réparti par les EPCI, chacun devant reverser au moins 50% des sommes ainsi perçues à ses communes membres.

Le potentiel financier n’est pas encore clairement défini (nature des charges à prendre en compte), mais il semblerait que l’on tende vers une prise en compte des richesses consolidées de chaque groupement avec celles de ses communes membres. Il me semble en effet plus pertinent de raisonner à l’échelle d’un territoire, celui d’un bassin de vie, celui d’une intercommunalité plus intégratrice. Cela impactera inévitablement la DSC.

Enfin, il ne faudrait pas reproduire l’erreur faite sur la péréquation verticale visant à accorder autant d’importance à la DSR (dotation de solidarité rurale) qu’à la DSU (dotation de solidarité urbaine), les populations ayant un mode de vie avant tout urbain. Espérons que les sénateurs sauront prendre en compte les charges de centralité supportées par les villes-centres, lesquelles ont besoin, plus que jamais, de développer leurs infrastructures de transports en commun et leurs politiques du logement et de l’habitat, dans une perspective de développement soutenable.

Le fonds de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) des départements et des régions pour 2013 : sur les flux ou les stocks ?

Il est actuellement impossible d’en évaluer le montant car celui-ci dépendra des montants perçus par chaque collectivité en 2010, or plus de la moitié du produit de la CVAE repose sur des entreprises multi-établissements. Ces données seront connues en juin 2011. Il faudra attendre 2013 pour connaître de façon définitive la répartition pour 2012 de la valeur ajoutée, permettant de comparer le montant enregistré en 2011. Il sera alors possible en 2013 de procéder à un écrêtement pour les uns et à un reversement pour les autres.

Les collectivités qui voient leur CVAE augmenter plus vite que la moyenne sont prélevées à hauteur de la moitié de l’écart entre celle-ci et leur produit de CVAE. Les bénéficiaires sont sélectionnés en fonction de l’écart entre leur potentiel financier par habitant et la moyenne des potentiels financiers. Le potentiel financier du Département dépend de la population, des bénéficiaires des minima sociaux, des personnes âgées de plus de 75 ans, de la voirie. Le potentiel financier de la Région dépend de la population, des effectifs des élèves scolarisés, des stagiaires de la formation professionnelle, de la superficie.

Fallait-il avoir sur ce fonds une approche pragmatique et attendre de bien connaître la réalité du produit de l’impôt avant d’établir les critères de péréquation, je ne le pense pas. Pouvons-nous dans ces conditions s’avancer sur les budgets et le niveau de pression fiscale à venir, je ne le crois pas non plus, surtout concernant les Conseils généraux, puisque ces derniers perçoivent à eux seuls près de la moitié de la CVAE.

Par ailleurs, des sénateurs militent afin que la péréquation s’exerce sur les stocks (sur les écarts de richesse) et non uniquement sur les flux (évolution récente de la richesse) de CVAE. La mission indiquait que « Le mécanisme sur stock permet de réduire les inégalités de moins de 5 % et le mécanisme sur flux de moins de 1 % à l’horizon 2015. La péréquation sur stock constitue, du fait de l’existence de mécanisme de garantie, une péréquation sur flux dont l’impact irait croissant.»

Gilles Carrez estime que cela conviendrait au principe de compensation intégrale de pertes de recettes accordées aux collectivités dans le cadre de la réforme fiscale. En effet, toutes collectivités subissant une perte de recettes récupère une dotation de compensation régionale de la TP (DCRTP), ainsi qu’une garantie individuelle de ressources (GIR) alimentée par le FNGIR, fonds national de garantie individuelle de ressources. La DCRTP fait l’objet d’une péréquation verticale de la part de l’Etat, le GIR d’une péréquation horizontale entre collectivités.

Imaginons que la péréquation s’exerce sur le stock de CVAE acquis avant la réforme, la collectivité perdante bénéficiera automatiquement d’un surcroît de GIR pour compenser la perte. Autant dire que cela revient à un jeu à somme nulle. A moins que le législateur ne prévoit au fil du temps une diminution du FNGIR…Point qui a déjà été évoqué, mais qui a fait l’objet de vives critiques de la part des édiles locaux.

16 février 2011

« Détroit, ville sauvage » ou les limites de la concurrence fiscale

Publié par alias dans Finances & fiscalité

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Voir le film Detroit Wildlife from florent tillon on Vimeo.

Ancienne colonie française fondée en 1701, devenue anglaise en 1760, Détroit est cédée aux Etats-Unis d’Amérique en 1783 (traité de Paris) et 1796 (traité de Londres). En 1805, Détroit subit un incendie dévastateur, qui détruisit la majeure partie de l’architecture coloniale française de la ville. Au cours du 19e siècle, les urbanistes, suivant la philosophie de City Beautiful construisent un certain nombre de bâtiments des styles Beaux-Arts et baroque.

La situation stratégique de Détroit au cœur des voies navigables des Grands Lacs en fait un centre logistique. La ville a continuellement grandi à partir de 1830 autour du transport lacustre, des chantiers navals et des industries manufacturières. En 1904, Henry Ford y fonda la Ford Motor Company  dans le Renaissance Center (groupe de 7 gratte-ciel).

La croissance explosive de la cité ne se fait pas sans sacrifices. L’air et l’eau de la région sont pollués, et les rives du lac sont outrancièrement industrialisés et interdits aux résidents. Les taudis se sont développés dans plusieurs quartiers, en particulier la partie est, de plus en plus peuplée par les Afro-Américains, dès 1920.

L’Interstate highway permit à des résidents de quitter la ville pour s’installer en banlieue et d’aller au travail en voiture. Le 23 juillet 1967, les émeutes les plus sanglantes et les plus destructrices de l’histoire des États-Unis éclatèrent dans la partie est de la ville. La population blanche quitta massivement la ville.

En 1973, un Maire noir membre de la gauche du parti démocrate est élu, mais il peine à créer des emplois du fait de la concurrence exercée par la ville voisine, Hamtramck, laquelle, sous la pression de l’industrie automobile, autorisent des exonérations fiscales. Le Maire démocrate fit alors appel à l’industrie des Casinos, sans succès.

GM, Ford et Chrysler règnent depuis des décennies sur Détroit. Aujourd’hui, les grands constructeurs automobiles américains masquent de nombreux buildings déserts et délabrés. Le taux de chômage officiel dépasse les 29%, voire 50% dans certains quartiers.

Subissant de plein fouet la crise immobilière et automobile, la ville devenue fantomatique tente de conjurer ce déclin. La transition d’une ville industrielle vers une ville maraîchère est en passe de se réaliser…Ainsi montre-t-elle des signes de résilience dans quelques quartiers (notamment dans le centre-ville et le long de la rivière).

9 janvier 2011

La mise en œuvre du mode Lolf dans les collectivités

Publié par alias dans Finances & fiscalité

Assurer la lisibilité des comptes, permettre aux élus et aux citoyens d’identifier les priorités établies par la collectivité, connaître les moyens dont dispose la collectivité pour chaque politique, mesurer les résultats obtenus et identifier les insuffisances, tels sont les objectifs de la Lolf. Elle conduit à identifier les améliorations à apporter au compte administratif de sorte que celui-ci dépasse son statut de contrôle de l’action de la collectivité et relève de la prospective. Elle permet un véritable débat et un véritable contrôle sur la politique, ce qui ne peut que bénéficier à la transparence et à la démocratie locale.

Certains directeurs aux finances expriment pourtant leur réticence quant à s’orienter sur une gestion en mode lolf, car celle-ci pourrait faciliter à terme le conditionnement des concours de l’Etat. Le développement d’indicateurs de performance communs afin de comparer les collectivités locales et visant à affecter une partie des dotations – d’équipement par exemple – en fonction de leurs résultats reste en effet d’actualité. Toutefois, Jean Arthuis ne considère-t-il pas comme admis le fait que l’Etat ne puisse fixer les objectifs budgétaires aux collectivités en raison du principe constitutionnel de libre administration, et d’autre part, ne vaut-il pas mieux connaître ses marges de progression que rester dans l’ignorance ?

La gestion des collectivités constitue un terrain particulièrement fécond de mise en œuvre de la démarche de performance sur laquelle repose la Lolf, mais cette mise en œuvre a conduit à des résultats particulièrement diversifiés. Celles qui ont utilisé les techniques de gestion l’ont fait, selon les cas, en se déconnectant résolument des techniques propres à la Lolf (par exemple à Lyon), d’autres, au contraire, en s’efforçant de transposer leur action en missions/programmes/actions, assortis d’objectifs et d’indicateurs.

(Lire la suite…)

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