L’un des enjeux du Grenelle : la maîtrise d’énergie des bâtiments
Alors que les réglementations thermiques n’ont cessé d’être plus exigeantes, la consommation énergétique des logements ne fit qu’augmenter du fait d’un besoin accru de confort.
On constate que la consommation unitaire moyenne d’une maison individuelle était 177,3 Kwh/m2/an avant 1975 et peut atteindre 272 Kwh/m2/an en 2008. Cette augmentation porte également sur le parc de logements collectifs qui est passé de 109,5 à 152,6 Kwh/m2/an en trente ans, bien que la part unitaire du chauffage avait chuté de 50%. Ces attentes de confort ont été confirmées par l’étude de l’Observatoire permanent de la rénovation énergétique du logement (OPEN) créé par l’ADEME en 2007. Cette étude concluait sur le fait que la demande de confort passait avant des travaux motivés par des économies d’énergie et que seuls 10% des travaux de rénovation avaient été jugés exemplaires.
Les enjeux actuels voudraient que la consommation totale de l’enveloppe du bâti ancien passe de 250 Kwh/m2/an à 60 Kwh/m2/an. Le Grenelle a acté la rénovation de 400.000 logements (privé et public) chaque année à compter de 2013 et celle de l’ensemble du parc de logements sociaux, avec, pour commencer, la réalisation de travaux sur les 800.000 logements sociaux les plus énergivores d’ici 2020, soit 100 000 logements sociaux par an.
En tout, 30 millions de logements sont potentiellement concernés. Or, dans le parc privé, la réhabilitation se fait un peu trop par composantes (toitures, façades, fenêtres, chauffages…) faute d’approche globale. Dans le parc public, les bailleurs sociaux finissent par acquérir des compétences internes pour la maîtrise d’ouvrage d’opération, mais aux dires de Qualitel, ils manquent cruellement de moyens financiers.
Il faudrait donc pouvoir changer de rythme, de méthode, d’opérateurs dans le secteur de la rénovation. Le plan de relance soutient l’ANAH et l’ANRU dans cette démarche (création d’un fonds dédié à la rénovation thermique et à la lutte contre l’habitat insalubre confié à l’ANAH de 200 millions d’euros pour 2009 - enveloppe de 1,2 milliard d’euros ouverts sur les fonds d’épargne de la CDC pour rénover les 100 000 logements sociaux par an), mais les financements publics sont-ils à la hauteur des enjeux ?
D’un montant de 9.000 à 16.000 euros par logement, l’éco-prêt logement social est cumulable avec les autres financements mis à leur disposition : dégrèvement de taxe foncière, dotations Anru, aides de l’Ademe, soutien du fonds Chaleur renouvelable, certificats d’économie d’énergie, etc. Les premiers prêts ont pu être accordés début mars et les premiers programmes de rénovation devraient être lancés en avril. Les 10.000 premiers prêts seront en outre majorés d’un montant de 1.500 euros.
L’éco-prêt à 1,9% correspond à une subvention de 10% des travaux et le dégrévement de 25% de la taxe foncière des propriétés bâties à 10% supplémentaires, ceci correspond aux 20% de subventions dont bénéficie le parc privé pour financer ses travaux. L’égalité de traitement réclamée par le monde HLM est donc satisfaite.
Toutefois, les crédits de la mission “ville et logement” connaissent un recul important. Doté de 7,64 milliards d’euros de crédits, le projet de budget 2009 pour le ministère de la Ville et du Logement subit une décote de 6,9 % et devrait reculer encore en 2010 et 2011, sachant que l’ANRU a changé de tutelle…
Le nouvel éco prêt à taux zéro destiné au parc privé ancien ne porte plus sur les équipements mais sur la performance thermique par bouquets de travaux, ce qui est préférable.
Si les travaux de rénovation coûtent en moyenne 35 000 euros, l’éco PTZ prévu dans la loi de finances est de 30 000 euros, ce qui revient à un prêt de 3000 euros/an pendant 10 à 15 ans. Ce prêt n’est donc pas accessible aux petites bourses, même si depuis le 1er juillet 2007, l’obligation de fournir un DPE pour chaque transaction devrait avoir pour effet d’assainir le marché de l’immobilier ancien.
Toutefois, si le PTZ ne sera pas cumulable avec le crédit d’impôt développement durable, il pourra bénéficier à tous les propriétaires pour financer des travaux dans leur résidence principale mais aussi dans les copropriétés et les logements mis en location. Cela aura un effet incitatif.
Le point de blocage venait surtout du milieu bancaire. Ces derniers souhaitaient pouvoir identifier le responsable thermorénovateur du chantier et mesurer l’économie d’usage afin de dégager les capacités de financement.
Ils demandaient à ce que la qualité et l’efficacité énergétique des travaux soient garanties par un organisme de contrôle via la création d’un label, avant d’accorder l’éco prêt. Cette garantie porterait sur le diagnostic et non sur le résultat, trop dépendant quant à lui des usages. Qu’en est-il aujourd’hui de cet organisme de contrôle et du label ECO Artisans ? Les banques se mobiliseront-elles ?
Plan Bâtiment Grenelle : place à la formation !
Je donne suite ici à deux articles rédigés en juin et octobre dernier tout en le réactualisant, car les dossiers avancent, fort heureusement ! La première réunion du bureau du comité stratégique du plan bâtiment Grenelle présidée par Philippe Pelletier, ancien Président de l’ANAH, s’est tenue le 12 mars dernier.
La mise en place de l’éco-prêt à taux zéro, l’extension du crédit d’impôt développement durable, la distribution de prêts bonifiés pour la rénovation thermique des logements sociaux ou encore le lancement du programme relatif aux bâtiments publics figurent parmi les priorités.
Piloté par Jean-Claude Vannier, le groupe portant sur l’éco-prêt à taux zéro concernant le bâti ancien s’est déjà réuni plusieurs fois et trois décrets d’application ainsi qu’un arrêté concernant l’Eco PTZ ont été publiés au 31 mars 2009. Très bien, mais qui s’occupe de la formation professionnelle ?
Dans un précédant l’article portant sur «L’un des enjeux du Grenelle : la maîtrise d’énergie des bâtiments» de juin 2008, je rappelais que selon les participants au Grenelle, les diagnostics de performance énergétique (DPE) n’étaient pas suffisamment précis pour justifier du respect de la Réglementation thermique (RT).
Le Grenelle avait donc pris l’engagement à ce qu’à partir de 2010, une « méthodologie » puisse être mise au point pour permettre une vérification du bâtiment qui soit conforme au mode de calcul de la RT. En juin, le RAC insistait également sur le fait que le plan de rénovation de grande ampleur avec obligation de travaux n’était assorti d’aucune dotation y afférente.
Et si l’UMF constatait déjà en octobre que la conjoncture faisait que les artisans avaient tendance à se replier sur la rénovation, la situation ne s’est guère améliorée. La Capeb prévoit la suppression de 15 à 20 000 emplois au 1er semestre 2009 (chute de 4% du volume d’activité), malgré les aides de trésorerie du plan de relance. Or rénover pourrait s’avérer sur certains projets moins écologiques que reconstruire, d’autant que la rénovation est techniquement plus difficile.
Ce nouveau défi écologique nécessite beaucoup d’ingénierie et de nombreux emplois sont à la clef (31 millions de logements existants et 600 milliards d’euros de travaux en tout, 110.000 créations d’emplois supplémentaires d’ici 2012). Ce créneau est porteur.
En octobre, la nouvelle profession de « thermorénovateur » était en voie de création. Les acteurs appelaient alors de leur voeu le développement de nouvelles filières de formation régionales sur la thermorénovation, notamment via l’AFPA et la CAPEB. Qu’en est-il aujourd’hui de ces filières de formations ?
Il semblerait que la subvention d’exploitation de l’AFPA fixée pour les exercices 2004 à 2006 à hauteur de 44 millions d’euros ait été progressivement réduite à 32 millions d’euros en 2007, 27 millions en 2008 pour atteindre un seuil de 22 millions d’euros en 2009, avant d’être prochainement confiée aux Conseils régionaux dans le cadre de la réforme professionnelle. Le projet de loi sur ladite réforme devrait être déposé au parlement à la mi-avril 2009.