Le temps, la ville et l’urbaniste

10 juin 2012

La financiarisation de l’immobilier

Publié par alias dans Aménagement & urba

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Christian Topalov situe le début de la domination du capital financier au sein des sociétés de promotion et l’apparition des promoteurs financiers au milieu des années 60. Ces logiques se sont accentuées au cours des années 70, avec un rôle croissant du capital bancaire, distribuant les crédits d’accession à la propriété.

Au tournant des années 90, c’est au gré des opérations de concentration et d’internalisation des capitaux que les promoteurs évoluent (introduction en Bourse de Kaufman & Broad en 2000, de Nexity en 2004, des Nouveaux constructeurs en 2006).

Au cours des années 90, le marché de l’immobilier s’est en partie dématérialisé via des sociétés cotées et non cotées. Le statut de SIIC, société immobilière d’investissement cotée, créé par la loi de finances du 30 décembre 2002, symbolise le principe de titrisation, en transformant l’immeuble en titres de créances négociables en bourse.

Dans un contexte de privatisation de grandes entreprises nationales et d’essor de la retraite par capitalisation, l’Etat a souhaité réorienter l’épargne à long terme des ménages français vers la Bourse, en octroyant une niche fiscale (actions des SIIC intégrées au PEA) ; Le dispositif prévoyait une taxation sur les plus-values immobilières minorée : 16,5% au début, puis 19% en 2009, au lieu du 33,3% du régime général.

La transparence fiscale s’applique si les SCII distribuent à leurs actionnaires au minimum 85% de leurs résultats, la moitié des bénéfices provenant de la cession d’immeubles ou de participations, et la totalité des dividendes de leurs filiales SIIC-filles. Ceux sont alors les actionnaires et non l’entreprise qui sont imposés.

La répartition des bénéfices prévue au profit de la rémunération du capital n’est pas sans conséquence : les SCII sont contraintes à renoncer à leur autofinancement et doivent recourir aux marchés financiers et boursiers pour se recapitaliser, ce qui les rend extrêmement dépendantes des fluctuations des marchés boursiers. La valeur de l’actif physique n’est plus associée à un usage mais à un produit financier négociable sur les marchés des capitaux.

La quête d’un taux de risque-endettement optimal oblige les SIIC à mettre en œuvre une stratégie immobilière très sélective en termes de marché, de produit, de localisation, de locataire, ce qui paraît s’opposer au mouvement de développement urbain durable :

Motivées par une création de valeur actionnariale court-termiste, malgré un discours mobilisateur sur le développement durable (incorpore les cleentechs aux immeubles de prestige, mise en œuvre de la HQE…), les SIIC constituent une approche hypersélective de la production urbaine, antinomique avec le concept multidimensionnel et long-termiste de la ville durable, conclura ainsi Cyril Boisnier dans la revue Urbanisme de juin 2012.

Subissant de plein fouet la crise financière associée aux subprimes, ce dispositif, lequel visait à stimuler l’épargne des ménages, sera finalement abandonné dans la loi de finances du 28 décembre 2011.

Revue Urbanisme, La ville financiarisée, mai-juin 2012.

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