Recours pour excès de pouvoir et recours en plein contentieux
Parmi les ouvrages de droit conseillés par l’INET pour le concours d’administrateur figure « Les annales du droit administratif 2012 » des éditions Dalloz. Des professeurs de différentes universités soulèvent des cas pratiques intéressants.
L’une d’elle enseigne à l’université du sud Toulon-Var. Elle conclut son exposé, concernant la plainte d’un parent confronté au refus d’une école municipale de musique de modifier son règlement modulant les tarifs selon l’ancienneté de l’élève, ainsi :
« Il appartient (au parent d’élève effectivement discriminé) d’introduire un recours en plein contentieux en s’appuyant sur l’illégalité de la décision de refus au regard du principe d’égalité des usagers devant le service public. »
« Si le délais du recours pour excès de pouvoir n’a pas expiré, il peut également introduire un recours pour excès de pouvoir contre la délibération du conseil municipal fixant les tarifs d’inscription à l’école de musique municipale. »
Or, j’ai cru lire par ailleurs que les parties ne peuvent exercer contre les actes détachables un recours en excès de pouvoir si la possibilité leur est offerte d’aller en plein contentieux ?
En effet, dans le même ouvrage, mais sur un autre cas d’espèce (affaire n°2), selon la professeure de l’université de Franche-Comté, le tribunal de Lyon considère que la délibération prononçant la résiliation anticipée (ou la modification unilatérale du contrat) de la convention (du contrat) fait figure d’acte détachable.
L’invocabilité d’un recours contre l’acte détachable (la délibération) est limitée aux seuls recours pour excès de pouvoir formés par les tiers du contrat ; en vertu de la règle de l’absence de recours parallèle et dans la mesure où les parties disposent de la possibilité d’exercer un recours de plein contentieux, elles ne peuvent former un recours pour excès de pouvoir. (CE, 2 févier 1987, Association Société France 5. CE, 2 février 1987, Société TV6).
La délibération visant à résilier (modifier unilatéralement) le contrat peut donc faire l’objet d’un tel recours uniquement si celui-ci est formé par un tiers au contrat, tiers devant par ailleurs justifier d’un intérêt à agir.
En l’espèce (une convention d’affermage - affaire n°2), le recours pour excès de pouvoir a été formé par le cocontractant, il est donc déclaré irrecevable par le juge administratif. Seul le recours de plein contentieux lui est ouvert.
Suivant en partie les conclusions de la professeure de Franche Comté, La Gazette des communes indique que « le principe est que le recours pour excès de pouvoir n’est en effet pas recevable si le requérant dispose d’un autre type de recours juridictionnel d’une aussi grande efficacité pour anéantir les effets de l’acte illégal (la délibération). »
Mais, nous dit la Gazette des communes, la portée de cette exception a été considérablement limitée, d’abord par la jurisprudence Lafage, qui a permis que le recours pour excès de pouvoir puisse être exercé au lieu et place d’un recours de plein contentieux contre une décision à objet pécuniaire, lorsque la question à juger est exclusivement celle de la légalité de cette décision et que le requérant ne demande rien de plus que son annulation (CE, 8 mars 1912, Lafage). On peut en déduire que seul le recours en REP était ouvert au parent d’élève.
De plus, nous dit la Gazette, la jurisprudence sur les actes détachables du contrat permet d’admettre la recevabilité du recours pour excès de pouvoir contre ces actes (décisions relatives à la conclusion, à l’exécution et à la résiliation du contrat).
En conclusion, si la professeure de l’université Franche Comté préconise uniquement la voie du plein contentieux en s’appuyant sur la jurisprudence CE Société TV6 de 1987. Cette jurisprudence semble entrer en contradiction avec la jurisprudence CE Lafage de 1912, laquelle préconise uniquement le recours pour excès de pouvoir en lieu et place d’un REP.
La professeure de l’université de Toulon Var semble préconiser pour le coup les deux voies de recours, sachant que les livres de droit prétendent chacun indiquer les « conditions tenant à l’absence de recours parallèle » de la part des parties contre les actes détachables des contrats.
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