Le temps, la ville et l’urbaniste

27 mars 2011

Les trois fonds de péréquation horizontale

Publié par alias dans Finances & fiscalité

Suite au rapport Durieux portant « Evaluation de l’impact de la réforme de la taxe professionnelle sur la fiscalité des collectivités locales et sur les entreprises », la loi de finances pour 2011 a créé trois fonds de péréquation entre collectivités territoriales.

La péréquation horizontale consiste à écrêter les recettes des collectivités les plus riches au bénéfice des plus pauvres. Difficile de ne pas soutenir une telle démarche dans un Etat républicain affichant la fraternité, entendez la solidarité, aux frontons de ses hôtels, et pourtant, cela n’est pas si simple qu’il n’y paraît. 

Si le mode de calcul  du fonds relatif aux droits de mutation à titre onéreux (DMTO) semble stabilisé, le mode de calcul portant sur les fonds relatifs à la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) et aux recettes fiscales intercommunales et communales (FNPRIC) devront être précisés d’ici juin. Et si la péréquation horizontale ne reposera pas sur le potentiel fiscal mais bien sur le potentiel financier (recettes fiscales + dotations de l’Etat), la question de la prise en compte des charges/dépenses reste à ce jour entière concernant le FNPRIC.

Le fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) perçus par les départements : une forte volatilité ?

Ce fonds représente 365 M d’euros sur un produit global de 7 Mds d’euros devraient être redistribués entre départements.  

Y sont contributeurs les conseils généraux dont le montant de DMTO perçus l’année précédente est supérieur de 0,75 fois le montant moyen par habitant des droits perçus par l’ensemble des départements la même année. Un second prélèvement est opéré pour les conseils généraux dont les DMTO de l’année n sont supérieurs à la moyenne de ceux en n-1 et n-2 multiplié par deux fois l’inflation (péréquation sur les flux). Il s’élève à la moitié du surplus constaté. Ces prélèvements sont plafonnés à 5% des droits perçus l’année précédente. En sont bénéficiaires, les départements dont le potentiel financier est inférieur à la moyenne.

Parmi les principaux contributeurs, Paris (66 M d’euros), les Hauts de Seine (38 M d’euros) et les Yvelines (24 M d’euros). A l’occasion du dernier club des finances des collectivités, Gilles Carrez n’a pas manqué de sermonner doctement le Département de Paris, lequel aurait œuvré pour faire baisser sa contribution ; l’attitude du Département du Rhône a également défrayé la chronique pour la même raison…

La péréquation ne semble en effet pas très forte, mais il faut tenir compte du fait que les conseils généraux sont fortement contraints dans leurs dépenses sociales et que leur pouvoir fiscal ont été diminué de moitié. En effet, les conseils généraux sont moins des institutions de projets (voirie) que de gestion (RSA, APA), mettant en application des politiques largement définies et encadrées par le pouvoir central, lesquelles, de surcroît ne sont pas compensées spontanément et nécessitant un fort lobbying local (attente d’une loi de finances rectificative).

Je pense aussi que la volatilité des DMTO ne facilite pas un fort niveau d’engagement des collectivités considérées comme aisées, mais sans doute faut-il voir dans ce fonds une forme de sécurité collective, à condition que le marché immobilier ne s’effondre pas brutalement partout. Le succès de la péréquation dépendra inévitablement de notre politique immobilière (de l’habitat).

Le fonds de péréquation sur les recettes fiscales intercommunales et communales (FNPRIC) pour 2012 : vers une consolidation sur le modèle du FSRIF.

La loi de finances prévoit la création d’un fonds national de péréquation des recettes fiscales intercommunales et communales à compter de 2012. Le montant devrait progressivement atteindre 2% des recettes fiscales du bloc communal en 2015.

Les contributeurs seront les communes et EPCI dont le potentiel financier par habitant est supérieur à une fois et demie celui moyen par habitant. Le fonds sera réparti par les EPCI, chacun devant reverser au moins 50% des sommes ainsi perçues à ses communes membres.

Le potentiel financier n’est pas encore clairement défini (nature des charges à prendre en compte), mais il semblerait que l’on tende vers une prise en compte des richesses consolidées de chaque groupement avec celles de ses communes membres. Il me semble en effet plus pertinent de raisonner à l’échelle d’un territoire, celui d’un bassin de vie, celui d’une intercommunalité plus intégratrice. Cela impactera inévitablement la DSC.

Enfin, il ne faudrait pas reproduire l’erreur faite sur la péréquation verticale visant à accorder autant d’importance à la DSR (dotation de solidarité rurale) qu’à la DSU (dotation de solidarité urbaine), les populations ayant un mode de vie avant tout urbain. Espérons que les sénateurs sauront prendre en compte les charges de centralité supportées par les villes-centres, lesquelles ont besoin, plus que jamais, de développer leurs infrastructures de transports en commun et leurs politiques du logement et de l’habitat, dans une perspective de développement soutenable.

Le fonds de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) des départements et des régions pour 2013 : sur les flux ou les stocks ?

Il est actuellement impossible d’en évaluer le montant car celui-ci dépendra des montants perçus par chaque collectivité en 2010, or plus de la moitié du produit de la CVAE repose sur des entreprises multi-établissements. Ces données seront connues en juin 2011. Il faudra attendre 2013 pour connaître de façon définitive la répartition pour 2012 de la valeur ajoutée, permettant de comparer le montant enregistré en 2011. Il sera alors possible en 2013 de procéder à un écrêtement pour les uns et à un reversement pour les autres.

Les collectivités qui voient leur CVAE augmenter plus vite que la moyenne sont prélevées à hauteur de la moitié de l’écart entre celle-ci et leur produit de CVAE. Les bénéficiaires sont sélectionnés en fonction de l’écart entre leur potentiel financier par habitant et la moyenne des potentiels financiers. Le potentiel financier du Département dépend de la population, des bénéficiaires des minima sociaux, des personnes âgées de plus de 75 ans, de la voirie. Le potentiel financier de la Région dépend de la population, des effectifs des élèves scolarisés, des stagiaires de la formation professionnelle, de la superficie.

Fallait-il avoir sur ce fonds une approche pragmatique et attendre de bien connaître la réalité du produit de l’impôt avant d’établir les critères de péréquation, je ne le pense pas. Pouvons-nous dans ces conditions s’avancer sur les budgets et le niveau de pression fiscale à venir, je ne le crois pas non plus, surtout concernant les Conseils généraux, puisque ces derniers perçoivent à eux seuls près de la moitié de la CVAE.

Par ailleurs, des sénateurs militent afin que la péréquation s’exerce sur les stocks (sur les écarts de richesse) et non uniquement sur les flux (évolution récente de la richesse) de CVAE. La mission indiquait que « Le mécanisme sur stock permet de réduire les inégalités de moins de 5 % et le mécanisme sur flux de moins de 1 % à l’horizon 2015. La péréquation sur stock constitue, du fait de l’existence de mécanisme de garantie, une péréquation sur flux dont l’impact irait croissant.»

Gilles Carrez estime que cela conviendrait au principe de compensation intégrale de pertes de recettes accordées aux collectivités dans le cadre de la réforme fiscale. En effet, toutes collectivités subissant une perte de recettes récupère une dotation de compensation régionale de la TP (DCRTP), ainsi qu’une garantie individuelle de ressources (GIR) alimentée par le FNGIR, fonds national de garantie individuelle de ressources. La DCRTP fait l’objet d’une péréquation verticale de la part de l’Etat, le GIR d’une péréquation horizontale entre collectivités.

Imaginons que la péréquation s’exerce sur le stock de CVAE acquis avant la réforme, la collectivité perdante bénéficiera automatiquement d’un surcroît de GIR pour compenser la perte. Autant dire que cela revient à un jeu à somme nulle. A moins que le législateur ne prévoit au fil du temps une diminution du FNGIR…Point qui a déjà été évoqué, mais qui a fait l’objet de vives critiques de la part des édiles locaux.

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