Projet de loi Grand Paris : deux EPIC pour les transports et Saclay
Je me serais attendue à ce que le Grand Paris soit une structure intercommunale créée à l’initiative des collectivités locales franciliennes dans le prolongement du syndicat mixte d’études lancé par Pierre Mansat, mais il se pourrait qu’il n’en soit rien. Le Grand Paris ne sera pas Paris Métropole. En effet, l’avant-projet de loi « Grand Paris » du 28 juillet 2009, qui sera présenté cet automne aux élus locaux et aux parlementaires, imposerait aux franciliens la création de deux nouveaux Etablissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC), l’un étant en charge des infrastructures de transports ferrés dont un métro automatique (130 kms – coût : 21 milliards d’euros – première phase de travaux sur 2012-2017), et l’autre de l’aménagement du Plateau de Saclay (défini comme »territoire stratégique » parmi d’autres non évoqués).
Objectif affiché : renforcer et asseoir l’attractivité (économique) de Paris comme ville-monde. La capitale conforterait sa place dans la liste des mégapoles qui ne cessent de s’étendre, à l’image de Londres, New-York, Tokyo, Singapour, Sydney, Shanghai…Jusqu’ici, on y trouve surtout les réflexions de Christian Blanc et je ne reviendrai pas dans cet article sur les pôles de compétitivité et sur l’avis fort nuancé, pour ne pas dire mitigé, des chercheurs à ce propos.
L’avant-projet de loi prévoit principalement la création de l’EPIC « Société du Grand Paris ». Le Grand Paris se cantonnerait aux transports en commun et aux abords des gares (projet d’infrastructure d’intérêt national PINN – loi LOTI 1982). Bien sûr les besoins se font pressants, mais on aurait pu concevoir des compétences élargies au Grand Paris, suivant les travaux préparatoires du Syndicat mixte d’étude »Paris Métropole », on aurait aussi pu concevoir un meilleur fonctionnement du Syndicat des Transports d’Ile-de-France et de l’Etablissement foncier d’Ile-de-France [maintien de justesse de son droit de préemption dans la nouvelle version du projet de loi du 28 août 2009], sans avoir à créer une nouvelle entité…en sus de la RATP, de RFF et de la SNCF…La Société sera notamment en charge du processus de concertation, laquelle sera annoncée par le Préfet de Région et durera 4 mois (lancement prévu début 2010). Les Mairies et Présidents des collectivités territoriales pourront « s’inviter au débat », ils apprécieront cette recentralisation…
Toutefois, le Maire de Sceaux (DVD) ne contestait-il pas encore le projet métrophérique, Lui, qui se voyait déjà à la tête du STIF ! Des collectivités auront à supporter le coût des infrastructures sans pour autant bénéficier d’une desserte de proximité, or chacune d’entre elles voudrait pouvoir avoir « sa propre gare » pour « ses électeurs ». Le dossier transports patine depuis le début sur une histoire de couverture…La Société du Grand Paris aurait vocation à devenir « le chef d’orchestre » des transports franciliens et pourrait contracter avec les différents établissements, notamment la RATP qui se voit renforcée. Le gouvernement, en rajoutant une énième couche au mille-feuilles de la gouvernance, espère sans doute ainsi coordonner l’ensemble, en imposant son point de vue aux élus, du style : « cela fait trois ans que les élus régionaux ont la main, or c’est la thrombose dans les métros-RER depuis plus de vingt ans ; qu’importe si la Gauche (Ferri-Girault-Huchon +) a élaboré un projet avec à la clef un plan de mobilisation pour les transports de 18 milliards d’euros, l’UMP (Pécresse-Blanc-Karoutchi +) doit reprendre la main en Ile-de-France. » A présent, cela sera à celui qui dégainera le plus vite, situation pour le moins paroxystique, quand d’autres se font plus discrets.
Ainsi, le Réseau Grand Paris aura pour fonction de relier le coeur de l’agglomération parisienne aux principaux pôles ainsi que les différents aéroports et gares TGV. La Société du Grand Paris pourra acquérir des biens, par voie d’expropriation ou de préemption, sur un périmètre d’1,5 km maximum aux abords des nouvelles gares ou infrastructures, transformés en zone d’aménagement différé (ZAD). La Société fera office d’établissement public d’aménagement. L’approche se veut être celui d’un urbanisme de projet : les tracés, l’emplacement des gares, leur niveau de service et leur mode d’exploitation, seront définis…par décrets pris en Conseil d’Etat. Les documents d’urbanisme, dont le Schéma directeur de la région d’Ile-de-France, devront être rendus compatibles. Exit le Conseil Régional d’Ile-de-France et les collectivités locales, l’Etat sera majoritaire en voix. Dotée d’un capital initial de 4 milliards d’euros, la Société sera constituée de dotations de l’Etat «au moins pour moitié», le reste du capital étant constitué des dotations des collectivités locales de la région Ile-de-France.
La gouvernance de la Société du Grand Paris sera assurée par un directoire [de trois membres - mention supprimée dans le projet de loi du 29 août 2009], placé sous contrôle d’un conseil de surveillance, dont le Président, ainsi que plusieurs « personnalités qualifiées», seront nommés par décret pour 5 ans renouvelables. Un commissaire du gouvernement assurera la surveillance de la gestion financière et des activités de la Société. 35 milliards d’euros sont à trouver. Dans l’attente des conclusions finales du rapport Carrez (qui fut partiellement remis entre temps), l’avant projet de loi prévoit que le financement des infrastructures ferroviaires ainsi que du métro automatique soit assuré par les dotations de l’Etat, [de l'union européenne, des établissements publics - ajout dans le projet de loi du 29 août 2009] et des collectivités territoriales, un emprunt sur les marchés financiers garanti par l’Etat, [une fraction du versement transport, une fraction de la taxe sur les bureaux et de la redevance sur la création de bureaux en IDF, une augmentation de la tarification des usagers - supprimés dans le projet de loi du 29 août 2009 et remplacés par des produits de redevances ou taxes], une participation des aménageurs aux coûts des gares, le produit des ventes ou locations des biens immobiliers appartenant à la Société, des dons et legs…
L’avant-projet de loi « Grand Paris » prévoit aussi dans son titre 5 la création de l’Etablissement Public de Paris-Saclay. Ce titre semble complètement déconnecté du reste. L’établissement sera administré par un conseil de 4 collèges (Etat, collectivités territoriales, universitaires, chefs d’entreprise), désignés pour 5 ans renouvelables. Son PDG sera nommé parmi les administrateurs, par décret pris en Conseil d’Etat. Il sera créé un Syndicat mixte des transports entre l’Etablissement Public de Paris-Saclay, majoritaire, et des communes listées en annexe dans la loi. La pondération des voix des communes tiendra compte de leur population (ratio différent de la Société du Grand Paris, où l’aspect financier l’emportait). Le plan local des transports, une fois voté à la majorité des deux tiers, sera présenté au STIF. Le nouveau Syndicat mixte des transports du Plateau de Saclay et le STIF auront 6 mois pour s’accorder, après quoi le Syndicat mixte des transports du Plateau de Saclay deviendra l’autorité organisatrice de second rang et informera le Syndicat des Transports d’Ile-de-France des éventuelles radiations de lignes existantes.
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http://www.lagazettedescommunes.com/actualite/pdf/PJLGrandParis.pdf
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