La mondialisation accroît le risque de conflits locaux
Les auteurs Martin-Mayer-Thoenig de cet ouvrage intitulé « la mondialisation est-elle un facteur de paix? » analysent les interactions possibles entre commerce et guerre. Le postulat de Montesquieu, repris par les libéraux, voudrait que « l’effet naturel du commerce est de porter à la paix. Deux nations qui négocient ensemble se rendent réciproquement dépendantes. » Les gains économiques auraient donc un rôle dissuasif sur l’entrée en guerre des pays. De plus, le commerce en augmentant les interactions entre les agents économiques augmentent le flux d’informations et diminue les asymétries d’informations entre pays, ce qui a pour résultat de faciliter les négociations entre pays. A l’opposé, le courant marxiste soutiendra que l’asymétrie des relations commerciales entre pays crée des inégalités. Dès lors, les conflits d’origine commerciale sont susceptibles de dégénérer en conflits armés.
Les études empiriques menées de 1949 à 2001 par les chercheurs du CEPREMAP les amèneront à conclure sur le fait que le commerce bilatéral a eu un rôle pacificateur sur les relations bilatérales, même si l’asymétrie est plus forte lorsqu’il s’agit de commerce de matières premières que de produits manufacturés. La probabilité de guerre est d’autant plus forte que l’information est incomplète. Toutefois, la mondialisation aura des effets contradictoires sur la paix. En affaiblissant les dépendances économiques locales entre pays proches, elle pourrait rendre les conflits militaires plus localisés. Lorsque les relations commerciales multilatérales sont renforcées, le coût d’opportunité d’un conflit militaire bilatéral diminue et l’incitation à faire des concessions avec son pays voisin afin d’éviter l’escalade militaire s’en trouve amoindrie. Les conflits n’opposeront donc plus des blocs, ne seront plus généralisés, mais deviendront de plus en plus locaux et régionaux. Statistiques à l’appui.
Les auteurs évoqueront ensuite les variables de la guerre, en l’occurrence celles des disputes interétatiques militarisées (DIM) entre deux pays. Les facteurs susceptibles d’encourager le déclenchement d’un conflit militaire entre pays sont, sans hiérarchisation : une frontière commune, la surface des pays, un lien colonial passé entre les deux pays, un des pays exporte du pétrole, la moyenne des dépenses militaires, le commerce multilatéral, les sanctions commerciales bilatérales, être membre permanent du conseil de sécurité. Les facteurs susceptibles de dissuader le déclenchement un conflit militaire entre pays sont, sans hiérarchisation : le nombre d’années de paix, la démocratie, la distance, la différence des dépenses militaires, un accord d’intégration régionale, le commerce bilatéral, la corrélation des votes à l’ONU, être membre du GATT ou de l’OMC.
Or si les systèmes de préférences généralisées (SPG), consistant à donner à des pays en voie de développement des accès privilégiés aux marchés aux pays riches, ont eu un effet positif sur la croissance d’un grand nombre de pays pauvres, il conviendrait en parallèle de faciliter l’intégration régionale des pays en voie de développement. Les auteurs insistent essentiellement sur la nécessité de contrebalancer les effets du libéralisme-multilatéralisme commercial (accord GATT/OMC) par la multiplication d’accords régionaux. Des sanctions commerciales multilatérales pourraient être prises par l’ONU contre les pays bénéficiant du multilatéralisme entrant en conflit bilatéral avec leurs voisins.
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Martin P., Mayer T., Thoenig M., La mondialisation est-elle un facteur de paix ?, éditions rue d’Ulm, déc. 2008.
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