Le temps, la ville et l’urbaniste

14 mars 2009

Projet de loi création et internet/logiciels libres

Publié par alias dans Economie & clusters

En dépit du fait que seul un Français sur deux ait accès à internet – la France se situant seulement au 11e rang des pays européens – le basculement des usages des supports physiques musicaux vers le numérique semble irréversible. La commission permanente de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits instaurée le 1er août 2000 a ainsi perçu un peu plus de 1,2 milliard d’euros en 2006 et a publié cinq rapports.

Elle constate que le téléchargement illégal a pris une certaine ampleur. En effet, on estime à 50% de la valeur du marché de la musique la perte occasionnée par cette pratique, soit près de 369 à 500 millions d’euros selon les études, la fourchette basse aboutissant à la suppression de 1600 emplois.

En réaction, l’Europe adopta une directive européenne en 2001 portant sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur dans la société de l’information. Celle-ci fut transposée en droit français au travers de la loi DADVSI. Cette loi protége les droits d’auteur numérique en sanctionnant leur contournement, instaurant ainsi le délit pénal de contrefaçon pour lequel il est nécessaire de démontrer que les faits délictueux sont imputables à une personne déterminée. Elle prévoyait par ailleurs l’obligation de surveillance de sa connexion internet, mais cette obligation n’était assortie d’aucune sanction.

A présent, nos parlementaires examinent le projet de loi « création et internet » donnant suite au rapport Olivennes. La tonalité du rapport fut durcie par les accords de l’Elysée du 23 novembre 2007, pris en concertation avec les professionnels de la musique, du cinéma et de l’internet, lesquels proposèrent la mise en place de sanctions administratives en cas de non surveillance de sa connexion internet. Ces sanctions administratives sont conformes à l’article 1384 du code civil qui dispose que « l’on est responsable des dommages causés par le fait des personnes dont on doit répondre ou des choses que l’on a sous sa garde ».En cas de détournement d’une connexion, ce ne sera donc pas le responsable du téléchargement illégal qui sera poursuivi administrativement mais le titulaire de l’abonnement.

Les réactions sont nombreuses et portent notamment sur l’incompatibilité du système d’homologation avec les logiciels libres.

Elaboré suite aux accords de l’Elysée, le projet de loi « création et internet » prévoit ainsi que les sanctions administratives puissent être prises par la Haute autorité de la diffusion des œuvres et de la protection des droits sur internet (HADOPI), anciennement nommée Autorité de régulation des mesures techniques. L’HADOPI appliquerait un système de ripostes graduées, allant du simple avertissement, à l’avertissement par lettre recommandé jusqu’à la suspension temporaire de l’abonnement et l’établissement d’une liste noire des internautes. Aucune sanction ne sera prononcée sans qu’il n’y ait eu au préalable une procédure contradictoire. Le second groupe de sanctions relève du tribunal de grande instance et vise non seulement les internautes mais également les hébergeurs et fournisseurs d’accès. Ce modèle appliqué en Grande Bretagne et aux Etats-Unis montre que 80% des internautes ayant reçu un avertissement cessent de télécharger des œuvres illégalement. Certains détracteurs reprocheront à ce projet de loi la mise en place d’un système à double peine même si la Cour de cassation ainsi que le Conseil Constitutionnel (DC 28 juillet 1989) ont admis à plusieurs reprises cette coexistence de sanctions différentes (pénales et administratives) pour des faits identiques. D’autres diront que la suspension provisoire de la connexion internet est une atteinte portée aux libertés fondamentales pour lesquelles l’autorité judiciaire (et non administrative) reste à elle seule compétente ; toutefois, l’interruption de connexion pour défaut de paiement ne suscitent pas tant d’indignation. Peut-on considéré ce doit comme étant un droit fondamental ? Pour reprendre une autre image, il s’agit plus d’une mise en fourrière du véhicule que d’une suspension de permis. Les agents de la HADOPI seront assermentés et le traitement des données relèvera de la loi du 6 août 2004. Un décret en Conseil d’Etat devra spécifier les catégories de données conservées pendant un an, leurs destinataires et les conditions dans lesquelles les internautes pourront exercer leur droit d’accès et de rectification conformément à la loi du 6 janvier 1978. Finalement, ce projet de loi prévoit de multiplier les systèmes d’accès légaux aux contenus en sanctionnant la concurrence déloyale des services illicites, favorisera l’interopérabilité des plateformes légales, favorisera l’éclosion de nouveaux modes d’exploitation (VOD, services de musiques à la demande), si bien que les professionnels de la musique s’en félicitent. Cependant, et voici le principal reproche que nous puissions véritablement faire à ce projet de loi « création et internet » : l’homologation des logiciels de sécurisation exclut de fait la possibilité d’utiliser un ordinateur équipé en logiciels libres. Les utilisateurs de systèmes d’exploitation comme GNU/Linux seront donc de fait placés dans une insécurité juridique discriminatoire.

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